Deux jours après la présentation de sa nouvelle mouture, le Conseil national du numérique (CNNum) bogue déjà. Le secrétaire d’état au numérique, Mounir Mahjoubi, a demandé mercredi 13 décembre à sa présidente, Marie Ekeland, de modifier la composition de l’instance consultative.

La nomination au sein du CNNum de la militante féministe et antiraciste Rokhaya Diallo a en effet provoqué des vagues auxquelles le gouvernement n’a pas résisté. « Eu égard à l’ampleur des enjeux qui sont les siens, le Conseil national du numérique a besoin de sérénité pour travailler », a expliqué Mounir Mahjoubi dans un communiqué publié mercredi en début de soirée. Selon le secrétaire d’Etat, « les derniers échanges sur la composition du Conseil soulignent que ces conditions ne sont pas pleinement réunies ».

Il n’y fait pas directement référence, mais, le jour même, la députée Valérie Boyer (Les Républicains, Bouches-du-Rhône) avait publié sur Twitter une lettre adressée au premier ministre, Edouard Philippe, dans laquelle elle contestait le bien-fondé de la nomination de Mme Diallo. Dans son courrier, trois reproches étaient adressés à cette dernière. La signature, en 2011, d’une pétition critique de Charlie Hebdo, d’abord. Certains de ses engagements antiracistes et plus particulièrement sa dénonciation du « racisme d’Etat », ensuite. Et ses prises de position concernant le voile, enfin. « Je ne vois pas en quoi le fait de marquer la féminité par un voile, c’est plus sexiste que de le marquer par des talons aiguilles ou minijupe », avait-elle tout récemment déclaré dans une interview au magazine Regards.

« A l’heure où notre pays a plus que jamais besoin d’unité et de rassemblement vous nommez deux personnalités clivantes qui méprisent une large partie de la population », avance la députée dans son courrier. Le député et ancien premier ministre Manuel Valls (apparenté La République en marche, Essonne) s’est aussi fendu d’un tweet, trouvant « normal » que le gouvernement réclame le départ de Mme Diallo.

Valérie Boyer visait également dans sa lettre le rappeur Axiom, lui aussi nommé au CNNum, lui reprochant une ligne d’une chanson publiée en 2006 dans laquelle il déclamait : « J’m’appelle Hicham et pas Stéphane / Voilà c’qui dérange les porcs ». Le rappeur lui a répondu, toujours sur Twitter, l’accusant de « donner à [s]es paroles d’artiste une signification qu’elles n’ont pas [vous] contribuez à flatter l’extrême droite quand d’autres s’efforcent de permettre à toute la France d’avoir voix au chapitre », il explique également avoir « saisi » son avocat.

« Je n’ai pas le droit de collaborer avec les institutions de mon propre pays parce que j’ose dire publiquement qu’elles sont imparfaites ? Quelle étrange conception de la démocratie », a quant à elle réagi Rokhaya Diallo sur le réseau social.

Le Conseil national du numérique est une instance purement consultative, dont les membres sont bénévoles, et qui est chargée de conseiller le gouvernement sur sa politique en matière de numérique. Parmi ses membres figurent des patrons et des patronnes d’entreprises du numérique, des universitaires mais également un médecin, une réalisatrice ou encore une agricultrice.