L’actrice Winona Ryder, l’une des interprètes de la série « Stranger Things » de Netflix, lors de l’avant-première de la deuxième saison, à Los Angeles, le 26 octobre 2017. / Mario Anzuoni / REUTERS

Interrogé mi-octobre, Reed Hastings, le fondateur et patron de Netflix, ne semblait pas trop s’inquiéter du futur lancement d’une offre de streaming par Disney. La donne a peut-être changé, jeudi 14 décembre, avec l’annonce du rachat de la majeure partie de la 21st Century Fox par le groupe de Burbank, qui va ainsi mettre la main sur un important catalogue de films et de séries. « Disney et Fox pourraient proposer plus de titres que Netflix », prédisent les analystes de Barclays.

Sur le papier, le fonds du futur Disney a de quoi inquiéter le leader du streaming. Il rassemblait déjà les dessins animés et longs-métrages maison, les films d’animation de Pixar, les super-héros de Marvel, les trilogies de Star Wars et les séries des différentes chaînes de télévision de la société. S’y ajouteront les franchises à succès de Fox, comme Avatar, X-Men, La Planète des singes, L’Age de glace, Die Hard ou encore Alien. Et ses nombreuses séries : Les Simpsons, The Americans, Homeland, This is Us, Modern Family

Doublement perdant

Disney va par ailleurs acquérir des équipes de production ayant fait leurs preuves et qui alimentent les grilles des programmes des grandes chaînes américaines. Elles pourront bientôt être mises à contribution pour créer des contenus réservés à la future plate-forme de streaming de la société. Et lui permettre de diversifier son offre, globalement orientée vers le grand public.

Netflix pourrait être doublement perdant : en plus de devoir affronter un redoutable concurrent pouvant lui voler des abonnés, la société va subir un appauvrissement de son catalogue. Disney a déjà fait savoir qu’il ne renouvellerait pas l’accord qui le lie à Netflix jusqu’à la fin de l’année 2018. Et il est très probable que ses dirigeants choisissent la même option avec les productions de Fox.

« Disney est une fantastique marque mais notre croissance à l’international a été forte alors que nous n’y proposons pas ses contenus », relativisait en octobre M. Hastings, en marge de la publication des résultats trimestriels. Perdre les contenus de Fox pourrait cependant avoir un impact plus important. « Ils constituent l’un des piliers du catalogue de Netflix », observe Michael Nathanson, de MoffettNathanson. Selon ses estimations, Fox représente aux Etats-Unis 17 % des séries les mieux notées sur Netflix, contre 7 % pour Disney.

Des investissements massifs dans la création de contenus

Netflix a toutefois le temps de voir venir. La transaction ne sera pas conclue avant fin 2018. Et elle possède des contrats à long terme avec les différentes entités du groupe Fox. La société possède, en outre, une bonne longueur d’avance, avec 104 millions d’abonnés, dont 53 millions hors des Etats-Unis. L’offre de Disney ne sera initialement disponible que sur le territoire américain. Son implantation à l’international pourrait être lente. Netflix estime par ailleurs que les consommateurs s’abonneront à plusieurs offres en ligne.

Surtout, Netflix a déjà anticipé la volonté des groupes de télévision de récupérer leurs contenus. Depuis 2013, l’entreprise investit massivement pour financer ses propres séries et films, qu’elle a placés au cœur de sa stratégie marketing. House of Cards ou encore Stranger Things ont attiré de nouveaux abonnés. Début août, elle a par ailleurs mené la première acquisition de son histoire, l’éditeur de comics Millarworld, qui va lui permettre de créer des films et séries de super-héros.