Le Canada a fait, mercredi 13 décembre, un pas supplémentaire dans la protection des baleines noires, une espèce manifestement en danger, et des bélugas. Le ministre canadien des pêches, des océans et de la garde côtière, Dominique Leblanc, a en effet décidé de délimiter des zones de « protection de l’habitat essentiel » du cétacé. Cette mesure vise à protéger « des emplacements géographiques précis, qui sont critiques pour la survie et le rétablissement de l’espèce, comme l’endroit où les femelles mettent bas, où les œufs éclosent et où les individus s’alimentent ou élèvent leurs petits », explique un communiqué émis par le ministère canadien.

Le Canada est « tout particulièrement inquiet » pour la baleine noire dont la mortalité est plus élevée cette année que les précédentes. Depuis le début de 2017, 17 spécimens de ce mammifère marin - aussi appelé baleine franche -, sont morts, dont 12 depuis juin dans le golfe du Saint-Laurent. Les cinq autres ont perdu la vie dans les eaux américaines.

Alerte de la NOAA

Dimanche 10 décembre d’ailleurs, l’Agence américaine d’observation océanique et atmosphérique (NOAA) signalait qu’il fallait désormais envisager la possibilité que la baleine noire disparaisse complètement des océans si aucune mesure concrète n’était prise. Mark Murray-Brown, un conseiller de la NOAA sur les espèces menacées, a expliqué à l’Associated Press, que la baleine noire connaît un déclin prononcé depuis 2010 et que les femelles sont plus durement touchées. Il a également souligné que le fort taux de mortalité de 2017 coïncide avec une année de faible reproduction. Il ne resterait plus qu’une centaine de femelles en âge d’avoir des baleineaux.

Un rapport du Réseau canadien pour la santé de la faune publié en octobre a souligné que le golfe du Saint-Laurent est un espace de vie particulièrement important pour ce cétacé. Il abriterait en effet le quart des 458 derniers représentants de cette espèce dont les individus mesurent en moyenne 18 mètres et pèsent entre 50 et 70 tonnes.

Les autorités ont demandé une nécropsie de ces géants des mers retrouvés morts dans le golfe afin de connaître les causes de leur décès. Les médecins en sont arrivés à la conclusion que ces mammifères ont principalement péri d’hémorragies suite à de probables collisions avec des navires ou après avoir été pris au piège dans des équipements de pêche. Plusieurs d’entre eux avaient le corps lardé de cicatrices causées probablement par des filets de pêche.

Collusion avec les navires

Pour endiguer cette vague de mortalité, le gouvernement canadien avait déjà adopté des mesures d’urgence dans l’été en obligeant les plus gros navires à réduire leur vitesse dans le golfe, en mettant en place des restrictions sur les engins de pêche et en fermant même certaines zones de pêche. Afin d’éviter un nouveau taux élevé de mortalité chez la baleine noire, le ministre des pêches et des océans a demandé mercredi « une mise à jour de la désignation des habitats essentiels » en raison « des répartitions changeantes de population (de cétacés) résultant du changement climatique ».

Outre la baleine noire, les mesures annoncées par le gouvernement canadien visent également la préservation de trois espèces de poissons que sont le lépisosté tacheté, le dard de sable et le chabot des montagnes Rocheuses. Une espèce de mollusque appelée ormeau nordique sera aussi davantage protégée. Mais surtout, le béluga, autre cétacé caractéristique du Saint-Laurent, va aussi voir certaines de ses zones de vie et de reproduction protégées, sur le même principe que la baleine noire, alors que la population estimée dans le fleuve avoisinerait les 900 individus. Rien qu’en 2016, 22 carcasses de ce mammifère ont été retrouvées sur les berges du fleuve.

Un certain nombre de facteurs semblent contribuer au déclin de l’espèce dans le Saint-Laurent. Parmi ceux-ci, la pollution, la diminution des ressources alimentaires, le dérangement par les humains et la dégradation de l’habitat sont considérés comme les menaces principales au rétablissement de la population. Et comme les baleines noires, les bélugas peuvent également être victimes de collisions avec les navires ou d’empêtrement dans les engins de pêche.

En 2016, le gouvernement canadien avait pris des mesures de protection de l’habitat du béluga et de l’esturgeon blanc. TransCanada s’était vu refuser pour cette raison l’implantation d’un terminal pétrolier sur les rives du Saint-Laurent, là où les femelles bélugas mettent bas au printemps.