Le 22 octobre 2017, de gauche à droite, Guy Drut, Anne Hidalgo, Thomas Bach, Tony Estanguet et Denis Masseglia ont dévoilé les anneaux olympiques installés sur la place de l’hôtel de Ville de Paris. / STÉPHANE DE SAKUTIN / AFP

La « loi olympique » entre à l’Assemblée nationale mercredi 20 décembre. Et avec elle ses dérogations au droit français pour satisfaire aux exigences du Comité international olympique (CIO), mais aussi un volet sur l’éthique et la transparence dans la préparation des Jeux olympique de Paris 2024.

Le texte, porté par le ministère des sports, doit adapter la loi française au contrat « ville hôte » signé le 13 septembre à Lima, au Pérou, par la Mairie de Paris, le CIO et le Comité national olympique et sportif français (CNOSF). Ce contrat définit les engagements pris à l’égard du CIO, qui finance les Jeux à hauteur de 1,4 milliard d’euros, un peu plus du tiers du budget du Comité d’organisation des Jeux olympiques (3,8 milliards d’euros en 2024), le futur COJO.

Etienne Thobois directeur général de Paris 2024

Etienne Thobois, qui avait mené la candidature à l’organisation à Paris des Jeux olympiques 2024, a été sans surprise nommé mardi directeur général du Comité d’organisation (Cojo). Il a été préféré aux autres candidats par Tony Estanguet, président du Cojo, qui l’apprécie et l’a défendu face aux réticences de la maire de Paris Anne Hidalgo.

Dans ce contexte, « nous avons peu de marge de manœuvre », a résumé le député Régis Juanico (Nouvelle Gauche), durant l’examen en commission des affaires culturelles la semaine dernière.

Le projet de loi prévoit, dans certains cas et de manière temporaire jusqu’en 2024, de déroger à l’interdiction d’apposer de la publicité sur les monuments historiques ou sites classés, au profit des emblèmes olympiques. Durant trois mois autour des compétitions, l’affichage des sponsors du CIO et des Jeux de 2024 serait exceptionnellement autorisé sur les monuments historiques ou les sites classés accueillant des compétitions et dans un périmètre de 500 mètres autour.

« Le contrat de ville hôte impose en effet de faire “une place nette” de toute publicité pour ces partenaires de marketing olympique », a rappelé la rapporteuse du projet, Aude Amadou (LRM), lors de l’examen en commission.

« Matraquage publicitaire »

L’association de défense du patrimoine Sites et monuments, qui dénonce déjà « un matraquage publicitaire », a dressé une liste des lieux potentiellement concernés : Champ-de-Mars (volley), esplanade des Invalides (tir à l’arc), Roland-Garros (tennis), Champs-Elysées (cyclisme), jardins du Trocadéro (triathlon), parc de Versailles (équitation, natation, course et tir), Grand Palais (escrime, taekwondo) et plusieurs ponts sur la Seine (natation, aviron).
Certains députés se sont faits l’écho de cette inquiétude.

« Satisfaire à tout prix les annonceurs en faisant de Paris une vitrine de publicité n’est pas le bon moyen pour faire de cette fête un rassemblement populaire », a fait valoir Maxime Minot (LR). Mais les amendements pour diminuer les surfaces ont été repoussés.

« Pas de sponsors, pas de recettes, pas de JO possibles : on peut le regretter, mais c’est aussi simple que ça », a résumé Aude Amadou, ancienne handballeuse professionnelle.
Au-delà des sponsors du CIO, le futur Comité d’organisation des Jeux attend 1 milliard d’euros de ses propres partenaires commerciaux.

Urbanisme et transparence

D’autres dispositions sont prévues pour accélérer et simplifier les procédures d’urbanisme ou d’expropriation, en vue de la construction en Seine-Saint-Denis des villages des athlètes et des médias, qui seront par la suite transformés en logement, ou la possibilité pour le gouvernement de réserver des voies de circulation pendant les jeux, par ordonnance.

La société publique chargée de superviser les travaux, la Solideo, devra se doter d’une charte pour favoriser l’accès aux marchés aux petites entreprises et aux entreprises d’insertion, selon le projet amendé.

Enfin, un volet éthique et transparence prévoit un contrôle de la Cour des comptes et, pour les futurs patrons du COJO, l’obligation de remettre leur déclaration d’intérêt et de patrimoine à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP).

Le ministère des sports a annoncé mardi soir à l’Agence France-Presse qu’il soutiendrait un amendement prévoyant que ces obligations soient étendues à toutes les compétitions sportives internationales organisées de manière exceptionnelle en France ; ce qui inclut par exemple la Coupe du monde de rugby, en 2023.

Le groupe LRM veut aller plus loin et a déposé un amendement, contre l’avis du gouvernement, pour plafonner la rémunération des membres du COJO à 200 000 euros annuels.

La question des rémunérations a fait polémique, lorsque Le Canard enchaîné avait évoqué à la mi-octobre le salaire envisagé pour le patron du COJO, Tony Estanguet, à hauteur de 450 000 euros ; un chiffre immédiatement démenti par son équipe.

La loi olympique devrait être adoptée définitivement au premier trimestre 2018. Des dérogations fiscales pour les grands événements sportifs avaient déjà été votées par le Parlement à la fin de 2014.