Le 1er janvier 2018, tous les commerces en France assujettis à la TVA devront s’être équipés de logiciels de caisse certifiés. Inscrite dans la loi de finances de 2016, cette mesure est destinée à lutter contre les fraudes à la TVA réalisées par certains commerçants ou restaurateurs qui, au moment du décompte de leur recette, effaçaient certaines opérations réglées en espèces à l’aide de logiciels frauduleux.

Sans remettre en cause l’utilité de contrer les fraudeurs, les associations professionnelles de commerçants critiquent la précipitation à mettre en œuvre une mesure qui va, tant dans son investissement que dans sa réalisation, pénaliser l’ensemble du petit commerce, au moment où le secteur souffre. Notamment avec la concurrence d’Internet.

« Droit à l’erreur »

Certains regrettent, comme Francis Palombi, président de la Confédération des commerçants de France, « l’état d’esprit que crée cette réglementation en laissant entendre que tous les commerçants étaient jusqu’à présent des fraudeurs ». D’autres, comme William Koeberlé et Fanny Favorel-Pige, respectivement président et secrétaire générale du Conseil du commerce de France, s’interrogent : « Au moment où l’on travaille sur le droit à l’erreur, qu’il s’agisse des particuliers ou des entreprises, il est étonnant que, concernant la lutte contre la fraude à la TVA, on demande à des commerçants de devoir prouver leur bonne foi. »

Devant le manque d’information des pouvoirs publics et le niveau d’impréparation des commerces et de leurs experts-comptables, plusieurs organisations fédérant les commerçants ont demandé à en repousser l’échéance. Réponse du gouvernement : il faut appliquer la loi et les investissements peuvent être amortis.

Les représentants des commerçants dénoncent aussi l’investissement supplémentaire nécessaire pour acquérir un logiciel certifié (de 2 500 à 5 000 euros environ, d’après la Confédération des commerçants de France), qui s’ajoute aux dépenses qu’ils ont déjà dû consentir pour adapter leurs points de vente aux nouvelles normes d’accessibilité pour les handicapés, ainsi qu’au poids croissant de leurs charges. « Les loyers commerciaux ont progressé en moyenne de 10 % depuis 2008. La taxe foncière a augmenté de 21 % entre 2006 et 2011, puis de 14 % de 2011 à 2016… », énumèrent M. Koeberlé et Mme Favorel-Pige.

Demande d’un coup de pouce fiscal

Sachant qu’un autre investissement majeur attend les commerces s’ils veulent rester dans la course : Internet. Qu’il s’agisse d’une présence informative (horaires d’ouverture, mise en avant des produits…) ou marchande avec de la vente en ligne, exister sur la Toile sera de plus en plus indispensable. Les fédérations demandent un coup de pouce des pouvoirs publics, que ce soit dans l’organisation ou le financement.

La Confédération des commerçants de France suggère ainsi d’établir des périmètres géographiques de consommation où les acteurs se regrouperaient en « clusters » (grappes) pour promouvoir leur savoir-faire sur Internet, comme il en existe au Québec. Et le Conseil du commerce de France demande un coup de pouce fiscal, à l’image du crédit d’impôt recherche, pour que ces petites entreprises puissent investir dans le numérique.