L’incubateur de La Ruche !, à Paris. / PIERRE ANDRIEU / AFP

Espaces de coworking, fab labs, maker spaces… A mi-chemin entre les sphères personnelle et professionnelle, les tiers-lieux se multiplient depuis quelques années en France, générant avec eux une myriade d’événements participatifs, tels les hackathons et les start-up week-ends. Qu’ils fassent partie intégrante des campus ou qu’ils se situent à proximité des écoles et universités, ces espaces trouvent un large écho auprès des étudiants, de plus en plus attirés par l’esprit ­entrepreneurial. Si l’effet de mode est indéniable, il n’en reste pas moins que les tiers-lieux transforment profondément la manière d’apprendre et incitent à se lancer.

Convivialité

Cette volonté de rupture passe tout d’abord par une organisation différente de l’espace. A l’opposé de la disposition frontale de la salle de classe traditionnelle, les tiers-lieux sont en ­général dotés de tables et de chaises sur roulettes qui peuvent facilement être rassemblées pour former des îlots modulables. En outre, ­canapés, poufs et tables basses viennent enrichir le mobilier classique, apportant une touche de convivialité loin d’être anodine : « L’espace n’est pas uniquement fonctionnel, ce qui change fondamentalement le rapport au ­savoir. S’amuser n’est pas perçu comme négatif. Dès lors, l’apprentissage se fait de manière non violente, sur la base de la motivation intrinsèque », relève David Vallat, maître de conférences en sciences de gestion à l’université Claude-Bernard-Lyon-I, qui travaille notamment sur les nouveaux espaces collaboratifs.

Car c’est bien la vision d’un apprentissage non pas individuel mais collectif qui sous-tend ces aménagements. « Le modèle n’est pas celui, vertical, d’un expert qui transmet des connaissances, mais celui d’une coconstruction du savoir », poursuit le chercheur, qui y voit une rupture avec le schéma traditionnel, dans lequel « les élèves sont formatés pour ­restituer un savoir acquis, dans une logique de réussite individuelle ».

« Moins castrateurs »

Hérités du mouvement alternatif des ­makers, les fab labs mettent explicitement en avant cette idée de partage : les utilisateurs sont invités à documenter leurs projets, à aider les autres, voire à organiser de petites formations, comme c’est le cas au FacLab de l’université de Cergy-Pontoise (Val-d’Oise), premier fab lab d’une université française. ­Habitants du quartier et étudiants y sont ­accueillis gratuitement. En contrepartie, chacun doit contribuer à la vie du lieu, en fonction de ses capacités.

Qu’il soit inscrit dans une charte, un règlement intérieur, sur les murs, ou rappelé oralement, ce discours est un élément constitutif des tiers-lieux. Il est incarné par les concierges, super-connecteurs ou fab manageurs qui sont les garants de l’état d’esprit général de ces espaces et s’attachent à fédérer une communauté autour de valeurs liées à la collaboration, l’expérimentation, la créativité, le droit à l’erreur… « Les tiers-lieux postulent un discours entrepreneurial, productif et bienveillant, ­notamment par rapport au fait de se tromper, observe David Vallat. En cela, ils sont moins castrateurs que l’environnement d’apprentissage traditionnel. »

Ambiance décontractée

Venez essayer ! Telle est la philosophie des start-up week-ends qui réunissent des entrepreneurs en herbe mais aussi de nombreux ­curieux, tous mus par « l’envie de transformer une idée en projet et surtout de vivre un ­condensé d’aventure entrepreneuriale », souligne Damien Gromier, 30 ans, qui a organisé 75 événements de ce type depuis sept ans et qui, comme beaucoup d’autres participants, a lui-même eu l’« étincelle » à l’issue d’un start-up week-end en 2010. Un déclic dû, selon lui, à la fois « à l’ambiance générale, décontractée et ­motivante, au travail d’équipe et à l’horizon temporel court qui rend l’expérience très intense. La plus grande valeur de ces événements, estime-t-il, n’est pas le projet vainqueur, mais les 50 entrepreneurs potentiels qui en sortent ».

L’émulation naît aussi des rencontres et de la diversité des profils réunis dans les tiers-lieux. Ce principe est au cœur du concept de la ­Station F : lancé en juillet 2017 par Xavier Niel (actionnaire à titre individuel du Monde), cet incubateur géant réunit de grandes entreprises du Web et de l’industrie (Facebook, Vente-privee, Thales…), des centaines de start-up ainsi que des étudiants-entrepreneurs venus d’HEC, de l’Edhec ou des Arts et Métiers.

En outre, contrairement aux écoles et entreprises traditionnelles, où l’on demande aux élèves et salariés de laisser leur vie personnelle à la porte, les tiers-lieux mettent en avant non seulement les compétences de chacun, mais aussi leurs passions et hobbies, qui peuvent servir de point d’accroche et favoriser les échanges. Ce décloisonnement fait partie de l’esprit général et est aussi considéré comme une « source de richesse », indique ­David Vallat : « Comme on ne sait pas sur quoi est basée la créativité, plus il y a de profils et d’envies différentes, plus la capacité à innover est potentiellement grande. »

Participez à « O21 / S’orienter au 21e siècle »

Pour aider les 16-25 ans, leurs familles et les enseignants à se formuler les bonnes questions lors du choix des études supérieures, Le Monde organise la seconde saison d’« O21 / S’orienter au 21e siècle », avec cinq dates : après Nancy (vendredi 1er et samedi 2 décembre 2017, au centre Prouvé), rendez-vous à Lille (vendredi 19 et samedi 20 janvier 2018, à Lilliad), à Nantes (vendredi 16 et samedi 17 février 2018, à la Cité des congrès), à Cenon, près de Bordeaux (vendredi 2 et samedi 3 mars 2018, au Rocher de Palmer) et à Paris (samedi 17 et dimanche 18 mars 2018, à la Cité des sciences et de l’industrie).

Dans chaque ville, les conférences permettront au public de bénéficier des analyses et des conseils, en vidéo, d’acteurs et d’experts, et d’écouter et d’échanger avec des acteurs locaux innovants : responsables d’établissements d’universités et de grandes écoles, chefs d’entreprises et de start-up, jeunes diplômés, etc. Des ateliers sont aussi prévus.

Vous pouvez d’ores et déjà vous inscrire à Lille ! Pour toutes les villes, les inscriptions se font gratuitement via ce lien.

En images : les temps forts d’O21, nos conférences pour s’orienter au 21e siècle, à Nancy

Pour inscrire un groupe de participants, merci d’envoyer un e-mail à education-O21@lemonde.fr. L’éducation nationale étant partenaire de l’événement, les lycées peuvent organiser la venue de leurs élèves durant le temps scolaire.