La future Fondation de Chine a été conçue par les architectes urbanistes de l'Atelier FCJZ Coldefy & Associés. / FABLAB _ CAAU et FCJZ

« Les étudiants chinois vont enfin avoir un chez-eux en France. » Zhai Jun, l’ambassadeur de Chine à Paris, ne cachait pas sa satisfaction, le 6 décembre, lors de la signature officielle de la création de la Fondation de Chine dans le cadre de la Cité internationale universitaire de Paris (CIUP).

Pour ses 98 ans, le campus parisien, qui accueille 12 000 résidents (étudiants, chercheurs, artistes, sportifs…) de plus de 140 nationalités, s’offre une nouvelle « maison » dédiée à un pays. La première depuis 1969 – année d’ouverture de celle de l’Iran (devenue depuis la Fondation Avicenne). Tout un symbole, alors que le président français Emmanuel Macron entame l’année 2018 par une visite d’état en Chine.

Sur un terrain de 2 800 m², mis à la disposition de la République populaire par la chancellerie des universités de Paris, sera érigé un immeuble de brique abritant trois cents chambres, dessiné par un cabinet d’architectes urbanistes français selon une architecture inspirée de la Chine ancienne, avec notamment des jardins suspendus… La construction de cette résidence débutera à l’été 2018, une fois le permis de construire obtenu, au printemps. Elle devrait être inaugurée en octobre 2019, à la veille du centenaire de la « Cité U » parisienne.

« Nous espérons qu’il y aura parmi [ces étudiants] de futures leaders de la Chine de demain »

Donnant-donnant, tel est l’enjeu de cette future « maison » chinoise. Côté français, elle s’inscrit dans le plan de développement de la CIUP, avec la construction d’ici à 2020 de dix nouvelles résidences étudiantes, soit une augmentation de 31 % de la capacité d’accueil du boulevard Jourdan, au sud de Paris, qui abrite actuellement 5 800 chambres dans quarante « maisons » sur ses 34 hectares.

Rappelant la vocation des fondateurs de la Cité U de créer une « école des relations humaines pour la paix » au lendemain de la première guerre mondiale, « la Chine ne pouvait pas ne pas y être », a déclaré, à ses hôtes Jean-Marc Sauvé, le président de la CIUP. Côté chinois, la Maison de la Chine affiche une triple ambition, culturelle, politique et économique, dans le droit fil du « soft power » planétaire mis en branle par Pékin. Rappelons que chaque « maison » de la Cité U se doit d’accueillir au moins 30 % d’étudiants d’autres pays.

Depuis plus d’un siècle, des étudiants chinois viennent étudier à Paris, dont certains fondateurs historiques de la Chine populaire, tel Zhou Enlai, le bras droit de Mao. En 2020, ils seront 50 000, ce qui en fera la première communauté étudiante étrangère en France. « Nous espérons qu’il y aura parmi eux de futures leaders de la Chine de demain », glisse l’ambassadeur.

« Une vitrine pour la culture chinoise »

D’ores et déjà, c’est la deuxième nationalité étrangère présente sur le campus du boulevard Jourdan. Et le chinois est la langue dont l’apprentissage affiche « la plus forte progression en France », rappelle Gilles Pécout, recteur de l’académie et chancelier des universités de Paris.

L’idéogramme choisi par la Fondation de Chine en guise de logo : « entente, respect, paix, harmonie ». / DR

« Jardin de l’harmonie », tel sera le nom officiel de la Fondation de Chine qui porte le projet et gérera le bâtiment. « Une vitrine pour la culture chinoise, mais aussi une maison ouverte, un lieu d’échanges académiques », résume Zhai Jun. Une « vitrine » de cette mondialisation alternative à l’« American Dream », dont Xi Jinping, le président chinois, a fait son cheval de bataille lors de sa reconduction pour cinq ans en octobre.

Autre signe de l’importance accordée par Pékin à ce projet parisien : la présence du Beijing Capital Group (BCG) parmi les investisseurs. Li Aiqing, le président de ce conglomérat d’Etat – « classé dans le top 500 des entreprises mondiales », précise-t-il au passage –, est lui aussi dans la ligne du parti. Il rappelle que « la France est sur le trajet des nouvelles routes de la soie ». Allusion directe au projet OBOR (« Une ceinture, une route ») qui illustre les ambitions planétaires de Xi Jinping.

BCG est d’ailleurs l’un des opérateurs de la SFECZ, la plate-forme de coopération franco-chinoise de Châteauroux, où l’Université des sports de Pékin va ouvrir un campus. « Je formule le vœu que les autorités françaises et chinoises continuent à nous soutenir dans ces projets, explique-t-il. Nous saurons, de notre côté, contribuer encore davantage au dynamisme des échanges culturels entre Français et Chinois. »

« Chaque fondation nationale apporte à la Cité ses valeurs, sa propre note, comme le fait chaque musicien dans un orchestre », lance, un brin lyrique, Jean-Marc Sauvé. Une petite musique qui n’a pas échappé aux promoteurs de la Fondation de Chine. Leur partition tient en quatre mots : « entente, respect, paix, harmonie ». La traduction en français de l’idéogramme spécialement dessiné par un artiste chinois en guise de logo, « en écho direct aux valeurs de la Cité », s’est empressé de préciser l’un des officiels venus de Pékin, sans se départir de son sourire.