Publicité d’époque pour la Game Boy. / Nintendo

Pour un coup de com’, c’est un coup de com’ réussi. Hyperkin, constructeur californien spécialisé dans les consoles rétro bas de gamme, a profité du CES de Las Vegas, grand salon des innovations technologiques, pour présenter une machine lisant les cartouches de la Game Boy de Nintendo, la console portable monochrome culte des années 1990.

Suffisant pour que de nombreux sites spécialisés s’emballent : « La nouvelle console Game Boy renaît de ses cendres grâce à Hyperkin », s’enflamme Ère numérique ; « La nouvelle Game Boy est fabriquée par Hyperkin », en concluent Les Numériques ; « Game Boy, la console de jeux portable légendaire va faire son retour en 2018 ! », résume en plus affirmatif encore PhonAndroid. Le tout souvent assorti d’une photo issue du site américain Gizmodo, montrant l’objet en question affichant à l’écran le logo Nintendo.

Une confusion semble-t-il entretenue par la récente actualité de Nintendo, qui a réédité deux de ses anciennes machines avec la NES Classic Mini en 2016 et la Super Nintendo Classic Mini en 2017. Et par la société Hyperkin elle-même, en communiquant auprès du site américain Gizmodo sur l’« Ultra Game Boy », une « appelation temporaire utilisée pendant son développement », précise l’article. Et pour cause : Hyperkin ne détient aucun droit sur la marque Game Boy.

Des machines sans licence

D’une part, et au contraire d’autres constructeurs historiques comme SEGA et Atari, Nintendo ne sous-traite pas la fabrication de ses machines rétro. La NES Mini et la SNES Mini ont été conçues en interne, en grande partie par la cellule parisienne du consolier japonais, et ce devrait être le cas pour les prochaines consoles du même genre. À l’automne 2017 sont apparues sur le site officiel britannique de l’entreprise des versions numérisées de manuels de jeux Nintendo 64, laissant penser qu’elle serait la prochaine machine rééditée au format mini.

D’autre part, Hyperkin est un partenaire autorisé de Microsoft, Samsung ou encore Oculus, mais pas de Nintendo, comme l’indique l’entreprise sur son site officiel. Tous les produits proposés à la vente sous l’onglet « Nintendo » sont des machines sans licence, avec des noms librement inspirés des consoles d’origine, et sans garantie de comptabilité. À l’automne 2014, Pixels avait testé l’une d’entre elles, la Retron V, qui s’était révélée fragile, dysfonctionnelle et mal conçue. Hyperkin avait pour l’occasion était accusé d’avoir plagié le code d’émulateurs, des logiciels imitant sur ordinateur le fonctionnement de consoles existantes, et dont la légalité est elle-même sujet à débat.

En droit français, rappelait dans une tribune de 2016 Antoine Chéron, avocat spécialisé en propriété intellectuelle et NTIC, « l’émulateur de logiciel n’est [...] pas en harmonie avec le droit d’auteur sauf lorsque les auteurs, éditeurs ou les ayants droit de ces derniers ont manifesté leur volonté de ne plus exploiter leurs droits et hormis ce cas, on est en présence d’actes de contrefaçon en cas de reproduction du logiciel ou de décompilation à d’autres fins que celle d’interopérabilité. » Nintendo réédite déjà ses jeux Game Boy sur la boutique virtuelle de la 3DS, et rien n’exclut la possibilité que l’éditeur japonais annonce lui-même un jour une Game Boy Mini.