Photo non datée du navire « Seabed Constructor », dépêché dans l’océan Indien par l’entreprise américaine Ocean Infinity pour rechercher l’épave du vol MH370. / AP

A l’approche du quatrième anniversaire de la perte du vol MH370, le Boeing 777 de la compagnie Malaysia Airlines qui avait disparu des écrans radar entre la Malaisie et le Vietnam avec 239 personnes à bord, dans la nuit du 7 au 8 mars 2014, la Malaisie vient d’annoncer la signature d’un accord avec une société privée américaine, Ocean Infinity, qui va reprendre, à ses frais, les recherches de l’épave de l’avion dans l’océan Indien.

Les recherches initiales dirigées par l’Australie ont coûté 200 millions de dollars australiens (130 millions d’euros) et se sont terminées il y a un an. La principale conclusion du rapport officiel rendu public en octobre 2017 est la « quasi-certitude » que l’avion ne se trouvait finalement « pas » dans les 120 000 kilomètres carrés explorés.

Etonnamment, la Chine, qui avait le plus grand nombre de citoyens à bord de l’avion, n’a jamais montré grand intérêt pour ces recherches. Elle n’y a participé financièrement que tardivement, et à hauteur de 5 % seulement. « La compréhension de la localisation de MH370 est aujourd’hui meilleure qu’elle ne l’a jamais été », note toutefois le rapport. En août 2017, le CSIRO, le CNRS australien, avait déjà affirmé savoir où l’avion s’était abîmé « avec une précision et une certitude sans précédent », au nord-est de la zone explorée.

Payée en fonction des résultats

Des images satellites françaises d’objets flottants non identifiés ont alors fait un retour inattendu dans l’actualité pour corroborer cette « nouvelle zone ». Ces images avaient été partagées avec les autorités malaisiennes et australiennes au tout début des recherches puis ignorées car rien n’avait été retrouvé sur place. C’est donc sur cette nouvelle zone de 25 000 kilomètres carrés, à « très haute probabilité », que Ocean Infinity va se concentrer.

L’originalité de l’accord conclu entre Ocean Infinity et le gouvernement malaisien tient au fait que l’entreprise américaine ne sera payée qu’en fonction des résultats obtenus, dans un délai de quatre-vingt-dix jours : 20 millions de dollars si l’avion est trouvé dans les premiers 5 000 kilomètres carrés, 30 millions pour les 10 000 kilomètres carrés suivants avec un maximum de 70 millions pour un périmètre étendu.

Le navire de recherches norvégien, Seabed Constructor, affrété pour l’opération est équipé des meilleures technologies de recherche sous-marine, dont huit sonars sous-marins autonomes qui peuvent plonger jusqu’à 5 600 mètres de profondeur. L’opération doit commencer le 17 janvier. « Au cours des trois mois à venir, ils doivent sonder toute la zone. Ils doivent soit trouver le champ de débris ou les boîtes noires ou les deux, mais il faut que cela se fasse dans le délai imparti », a précisé le ministre malaisien des transports, Liow Tiong Lai. Il a estimé à 85 % les chances que l’épave s’y trouve.

« Nous apprécions l’offre audacieuse de Ocean Infinity », a déclaré l’association des familles des disparus. « Mais cela fait un an que nous demandons que les recherches reprennent. Pourquoi a-t-il fallu si longtemps pour lancer cette opération alors que les candidats sont prêts depuis des mois et pourquoi ne connaît-on pas les détails du contrat ? », interroge le Français Ghyslain Wattrelos, qui a perdu son épouse et deux de ses trois enfants dans le vol. « On nous a dit que le contrat était privé et confidentiel… », confirme la jeune avocate malaisienne Grace Nathan, dont la mère était dans l’avion.

Hautement improbable

Malgré les grands espoirs à nouveau formulés par les autorités malaisiennes, la nouvelle zone de recherche reste basée sur les mêmes extrapolations mathématiques extrêmement sophistiquées réalisées à partir des « handshake pings » (signaux passifs) que l’avion aurait continué d’émettre et que la société britannique de communication par satellite Inmarsat a captés. Mais cela n’a été corroboré par aucune trace tangible du crash de l’avion dans la zone pressentie. Malgré les semaines de recherche dans les jours qui ont suivi la perte de l’aéronef, aucun champ de débris et aucun corps n’avaient été repérés en surface dans cette région. A l’époque, ni images radar, ni images satellites, ni le moindre témoignage visuel n’étaient venus à l’appui de l’hypothèse de la zone de recherche initiale.

Cette recherche étant basée sur les mêmes analyses, il reste donc hautement improbable qu’elle permette de localiser l’épave du Boeing 777. « Personnellement, je ne crois pas à cette zone, mais je pense qu’ils vont se débrouiller pour trouver quelque chose, question de clore le dossier », affirme Ghyslain Wattrelos. En quatre ans, seuls trois débris retrouvés à plusieurs milliers de kilomètres de la zone de recherche ont été formellement confirmés comme venant de l’appareil.

L’opération australienne, qui n’a en rien fait progresser l’enquête sur le mystère du vol MH370, a toutefois permis de réaliser des cartes détaillées du relief sous-marin dans une zone jusque-là non explorée, des informations très utiles à l’exploration pétrolière ainsi qu’aux entreprises de pêche en grande profondeur.

Par ailleurs, nombre de familles, notamment chinoises, se sont opposées à l’initiative du gouvernement australien d’ériger un monument du souvenir sur la côte ouest de l’Australie. Pour les proches, tant qu’il n’y a pas de preuves tangibles que l’avion est bien tombé dans cette région, il n’y a pas lieu d’ériger un tel monument.