Documentaire sur France 5 à 22 h 35

Le président du conseil Pierre Mendès France et le Premier ministre chinois Zhou En-Lai lors de la Conférence Internationale de Genève en juillet 1954. / AFP

Il suffit parfois d’un rien, de quelques minutes décisives, d’une attitude un peu plus conciliante, pour éviter le pire. C’est ce que l’on retient de ce premier volet de la série documentaire (trois épisodes de 52 minutes) « Le jour où », signée Laurent Joffrin et Laurent Portes, qui donnent aux tractations menées par Pierre Mendès France à Genève en juin 1954 face à ses interlocuteurs soviétiques, américains, chinois et vietnamiens, des allures de thriller. A quelques minutes près, le conflit indochinois qui s’éternisait depuis près d’une décennie aurait, paraît-il, basculé dans une nouvelle guerre mondiale, avec troupes chinoises, américaines et soviétiques entrant dans la fournaise.

Après une première saison consacrée à la manière dont Hitler a perdu la guerre (un épisode retraçant les décisions de Roosevelt, un autre concernant Churchill et un troisième de Gaulle), les auteurs proposent, cette fois, une trilogie traitant de la fin de l’empire colonial français. Avant l’Algérie (diffusion le 21 janvier) et l’Afrique française (28 janvier), ce premier épisode se penche sur la décennie qui a vu la France perdre ses territoires en Indochine. Une guerre du bout du monde, ignorée par l’opinion publique française.

Premiers combats pour l’indépendance

L’Indochine, c’était la perle de l’empire français, la colonie la plus rentable économiquement. Au Cambodge, au Laos et dans les trois régions du Vietnam (Tonkin, Annam, Cochinchine), il ne s’agit pas de colonies de peuplement et la présence des colons français est faible. A l’aide d’archives intéressantes et de scènes reconstituées qui le sont moins, ce documentaire retrace les premiers combats de mouvements indépendantistes vietnamiens, les trajectoires de fortes personnalités résistantes comme Ho Chi Minh ou le général Giap, et les enjeux géostratégiques d’une région convoitée.

Lors de la conférence de Potsdam, en 1945, les Français sont absents et le sort de l’Indochine est tranché : au nord du 16e parallèle, les Chinois. Au sud, les Britanniques. Une décision inacceptable pour les Français qui vont, notamment avec le général Leclerc et sa mythique deuxième DB, reprendre le contrôle du territoire indochinois. Quelques dizaines de milliers de morts plus tard, la guerre se terminera avec la déroute de Dien Bien Phu, sanglante bataille qui débuta le 20 novembre 1953, autour d’une cuvette tenue par les troupes françaises, et qui s’acheva par la reddition des survivants français, le 7 mai 1954.

La guerre totale, à quelques minutes près

Dans un contexte international très tendu, alors que la guerre de Corée vient à peine de prendre fin et que la guerre froide est une réalité, la situation indochinoise inquiète les grandes puissances. Le 17 juin 1954, Pierre Mendès France, nouveau président du Conseil, annonce qu’il se donne trente jours pour mettre fin à la guerre d’Indochine, faute de quoi il démissionnera.

S’attachant à la personnalité de Mendès, les auteurs se focalisent sur les délicates tractations genevoises entre le Français et ses interlocuteurs. Face au communiste vietnamien Pham Van Dong, qui refuse de négocier un recul au-delà du 13e parallèle de la frontière entre Nord et Sud-Vietnam, il lance : « Vous allez nous obliger à la guerre totale. Et les Américains ne nous laisseront pas tomber. » Quelques minutes avant minuit, un accord sera finalement trouvé. Le 21 juillet 1954, Mendès peut annoncer : « La raison et la paix l’ont emporté. » Le retrait sécurisé des troupes françaises est acté. Mais des milliers de prisonniers restent détenus au Nord.

Le Jour où le Sud a gagné sa liberté, de Laurent Joffrin et Laurent Portes (Fr., 2017, 55 min).