A Paris, les conducteurs de la ligne 12 du métro ont été appelés à la grève, vendredi 19 janvier, par les syndicats CGT et SUD-RATP, excédés par des problèmes montants de toxicomanie dans le nord de la capitale.

Selon les syndicats, les agents de la RATP mais aussi les voyageurs font face à la présence de plus en plus forte de consommateurs de crack, un dérivé de la cocaïne, qui peut s’injecter ou se fumer à l’aide d’une pipe.

Ils dénoncent un « vrai manque de moyens humains » et veulent alerter les pouvoirs publics sur les perturbations et l’insécurité créées par certains consommateurs de drogues dans les stations de métro. Selon Jeremy Kahli, syndicaliste de SUD-RATP, quinze conducteurs ont été agressés sur la ligne 12 en 2017. Les agressions se font « à coups de poings, parfois à coups de seringues, sur les chauffeurs, les voyageurs et les agents de station, (…) souvent parce que quelqu’un s’est “shooté” et est en plein délire ».

« Présence de toxicomanes sur les voies »

Ces chiffres n’ont pas été confirmés par la RATP. Sollicitée par Le Monde, la direction reconnaît des « difficultés croissantes du fait de la présence d’usagers de drogue dans ses gares et stations, en particulier au nord de la ligne 12 et au nord de la ligne 4 ». Pour un conducteur de métro, qui parcourt la ligne 12 depuis six ans, c’est « principalement la présence des toxicomanes sur les voies » qui gêne leur travail, obligeant les agents à solliciter des coupures de courant pour éviter une électrocution, ce qui génère notamment des retards. Selon SUD-RATP, il y aurait eu plusieurs centaines « d’interruptions de pratique » sur la ligne 12 en 2017. Là encore, la RATP n’a pas communiqué de chiffres.

La toxicomanie dans le métro n’est pas neuve — « ça remonte à plus de vingt ans » — mais s’est aggravée ces dernières années, selon le syndicaliste, qui constate que le « problème grossit chaque année ». Sont concernées plusieurs stations du nord de Paris : Marcadet-Poissonniers, Château-Rouge, Jules-Joffrin ou encore Porte de la Chapelle. Un vrai problème social, pour lequel la RATP se fait aider du tissu associatif et social existant.

Des maraudes dans le métro

« La préfecture de la région Ile-de-France, la RATP et les centres d’accueil et d’accompagnement à la réduction des risques des usagers de drogue (Caarud) ont ainsi signé fin novembre une convention afin de permettre une meilleure prise en charge des toxicomanes présents dans les espaces du métro parisien », fait savoir la régie des transports. Par ailleurs, des « maraudes » sont effectuées par des associations depuis le 7 décembre 2017, poursuit la RATP, ce que confirme une source associative :

« Ces maraudes ont pour objectif de réduire la présence des usagers consommant des drogues sur les quais du métro, les sensibiliser au respect des voyageurs et agents RATP, et leur permettre d’accéder aux structures sanitaires et sociales en surface. »

« Pas des toxicomanes dans les rues et devant les magasins »

Jeremy Kahli estime qu’il s’agit d’un « serpent qui se mord la queue » et dénonce « l’hypocrisie des élus parisiens : on ne veut pas des toxicomanes dans les rues et devant les magasins, donc ils descendent dans le métro ». « C’est un problème social avant tout », reconnait-il. Les syndicats demandent aujourd’hui « plus de moyens humains et de structures adaptées ». Ils devaient manifester à Gare de Lyon, en début d’après-midi, à l’occasion d’une table ronde rassemblant notamment la régie et la préfecture de police de Paris. De son côté, la RATP assure que le « trafic est quasi normal » sur la ligne 12, vendredi.

Début janvier, déjà, le syndicat UNSA-RATP et l’association SOS Usagers ont adressé une lettre au ministre de l’intérieur, Gérard Collomb, à la maire de Paris, Anne Hidalgo, et à la présidente de la région Ile-de-France, Valérie Précresse, dénonçant un métro « envahi par des groupes de dealers » et des « toxicomanes souvent agressifs et dangereux », selon l’Agence France-Presse.

La RATP n’a pas été en mesure de chiffrer auprès du Monde les agressions dues aux consommateurs de drogue dans le métro, mais elle assure que la collaboration avec les forces de l’ordre a été accentuée depuis plusieurs années.