La GPA est une technique de procréation médicalement assistée (PMA) qui permet d’implanter un embryon (un ovule fécondé) dans l’utérus d’une autre femme, la mère porteuse. / LOIC VENANCE / AFP

Dans la présentation officielle des Etats généraux de la bioéthique, il n’y a que deux occurrences du terme. La gestation pour autrui (GPA) ne sera au programme de nulle réunion publique « citoyenne » ou table ronde organisée dans les différentes régions françaises durant les six prochains mois. Mais si la pratique ne figure pas parmi les principaux thèmes annoncés, la GPA promet déjà de s’inviter dans les débats.

LA GPA, c’est quoi ?

La GPA est une technique de procréation médicalement assistée (PMA). Il s’agit d’implanter un embryon (un ovule fécondé) dans l’utérus d’une autre femme, la mère porteuse, lorsque la femme ne peut pas le faire, ou dans le cas d’un couple d’hommes par exemple. A la naissance, la mère porteuse donne le bébé au couple et n’est pas considérée, juridiquement, comme la mère de l’enfant.

Dans une tribune publiée par Le Monde, 110 signataires plaident en faveur d’un débat de fond sur la GPA. L’opposition à cette pratique reste cependant très forte en France, et le gouvernement a exclu toute évolution législative sur le sujet.

Pourquoi la GPA n’est-elle pas au menu des discussions ?

La GPA est interdite en France, et aucun des principaux partis politiques ne propose de la légaliser, contrairement à ce qui est parfois annoncé par certains groupes conservateurs. Le gouvernement a d’ores et déjà exclu toute évolution législative sur le sujet de la légalisation de la GPA.

Le Comité consultatif national d’éthique (CCNE), chargé d’organiser les Etats généraux de la bioéthique tous les sept ans, est, lui aussi, catégoriquement hostile à la GPA. Le comité la distingue clairement de la PMA car elle engendre, selon lui, des « violences juridiques, économiques, sanitaires et psychiques qui s’exercent sur les femmes recrutées comme gestatrices ainsi que sur les enfants qui naissent et sont objets de contrats passés entre des parties très inégales », ce qui n’est pas le cas dans l’insémination avec donneur. Officiellement donc, la pratique n’a pas été inscrite au programme des débats.

Pourquoi la GPA sera débattue quand même ?

L’opposition à cette pratique est très forte en France, ses opposants craignant notamment une « marchandisation » du corps de la femme, comme ces quarante personnalités, parmi lesquelles Sylviane Agacinski, José Bové et René Frydman, qui signent, vendredi 19 janvier, une tribune dans Le Monde intitulée « Non au marché de la personne humaine ».

Mais la société évolue, et selon un récent sondage IFOP paru dans La Croix, près des deux tiers des Français se prononcent pour l’autorisation du recours à une « mère porteuse ». Dans le détail, 18 % s’y déclarent favorables « dans tous les cas » et 46 % « pour raisons médicales seulement ». Difficile, dès lors, d’imaginer qu’elle ne s’invitera pas dans le débat public consacré aux évolutions de la science et à l’attitude de la société face à ces pratiques.

Surtout, c’est la question du sort des enfants nés de GPA qui pose question, à l’heure où la France a été à plusieurs reprises condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) pour avoir refusé de transcrire les actes de naissance d’enfants nés d’une gestation pour autrui à l’étranger. En juin 2014, la CEDH avait estimé que la France pouvait interdire la GPA sur son territoire, mais qu’elle ne pouvait refuser de reconnaître les enfants nés d’une mère porteuse à l’étranger.

Le débat a-t-il lieu ailleurs ?

« On ne peut plus ignorer les enfants nés par GPA », s’alarmaient ainsi dans une tribune au Monde 110 signataires, dont Elisabeth Badinter, Pierre Rosanvallon et Irène Théry. Tous plaident pour une « réforme urgente sur la transcription de la filiation » des enfants nés de GPA à l’étranger, à l’occasion de la révision des lois de la bioéthique :

« C’est ici le rôle et la responsabilité du législateur, en relation avec la société, de faire évoluer le droit. »

Les signataires s’appuient notamment sur un sondage IFOP de juin 2017, montrant que 71 % des Français sont favorables à « la transcription intégrale à l’état civil français de la filiation de l’enfant établie légalement à l’étranger à l’égard de ses parents ».

C’est aussi une des raisons qui risque d’obliger la France à tenir de fait ce débat sur la GPA, même en dehors des programmes officiels. Royaume-Uni, Pays-Bas, Portugal, Grèce : il existe autour de nous de nombreux pays qui appliquent des protocoles de GPA, encadrés par une législation qui a déjà été l’occasion d’être débattue sur le plan éthique. Des modèles qui devraient obliger la France à discuter plus avant de cette pratique.