Mini-série sur Canal+ décalé

Avec son air de petit garçon premier de la classe, Chris Esquerre peut dire les pires horreurs, et ça passe. Les hochements de tête, de droite à gauche, et les moues satisfaites qu’il adopte pour les appuyer, rendent irrésistibles les stupidités qu’il prononce. Parce que le bougre sait observer et écouter le monde – particulièrement celui des médias dont il épingle les prétentieux débiles qui s’y agitent –, il est capable d’en reproduire les travers, les mesquineries, les absurdités. Et ça passe. Il dézingue, en douceur, avec l’air de ne pas y toucher : une signature à nulle autre comparable.

Miroir tendu à la télévision

Ici, Chris Esquerre se livre à une immersion dans les coulisses d’un magazine d’« Infotainment », en endossant le rôle de l’animateur-producteur. A ses côtés et surtout, à son service, œuvre une équipe dont les membres tentent de répondre à toutes les lubies du « patron ».

Redoutable pastiche d’un monde régi par les audiences, Importantissime met en scène les situations et les personnages ridicules qu’un tel système génère.

Choix de sujets racoleurs, « concernants et impactants », gestion humaine humiliante, discours creux et autocentré, réunions qui brassent de l’air… l’humoriste et sa bande tendent un miroir à une télévision qu’ils connaissent bien, sur ce format des talk-shows où alternent interviews politiques, reportages dits « sociétaux » et chroniques « tendance ». Un format sur les plateaux duquel Chris Esquerre se produit depuis plus de dix ans. D’abord à France 2, M6 puis Canal+, il a, en effet, délivré ses pastilles humoristiques, surréalistes et décalées.

Chris Esquerre / Canal+

Dans sa vraie-fausse émission dont il reproduit le quotidien (de l’élaboration à la mise à l’antenne), les horoscopes prédisent aux poissons « la possibilité d’un dégât des eaux » pouvant « entraîner une grave dépression » qu’ils surmonteront cependant « en moins de deux ans ». Le planning prévoit à chaque numéro, trois invités : un principal, un secondaire, et un de secours au cas où les deux précédents se montreraient ennuyeux. La miss météo ne dit pas un mot mais honore le plateau de sa présence en maillot de bain. Les chroniques s’attachent à la guerre des deux fromages (le comté et l’emmenthal), aux endives « victimes d’un préjugé », ou au cabillaud. Quant à la Corée, « bof, on sait jamais qui est le méchant », alors on passe. C’est à peine si l’on croit, parfois, à une parodie.

Importantissime (saison 1), série créée par Chris Esquerre (Fr., 2017, 6 × 15 min).