Le pape François dans l’avion du retour du Chili et du Pérou, le 22 janvier. / ALESSANDRO BIANCHI / REUTERS

Après l’accroc, l’explication. Dans l’avion qui le ramenait du Pérou, lundi 22 janvier, le pape François a « demandé pardon » aux victimes de pédophilie au sein de l’Eglise catholique, pour avoir employé, pendant son voyage, une formule qui, a-t-il reconnu, a pu leur faire l’effet d’une « gifle ». Au dernier jour de sa visite au Chili, au micro de médias locaux, le pontife avait en effet sèchement rabroué les victimes d’un prêtre, Fernando Karadima, qui accusent un évêque chilien, Juan Barros, d’avoir couvert par son silence les agressions sexuelles du curé.

« Le jour où vous m’apportez une preuve contre Barros, je parlerai. Il n’y a pas une seule preuve contre lui. Ce ne sont que calomnies. C’est clair ? », avait lancé François, jeudi. Les victimes du prêtre en avaient été consternées. « Comme si on avait pu prendre un selfie ou une photo pendant que Karadima abusait de moi ou d’autres avec Juan Barros à côté », avait tweeté l’une d’elles, Juan Carlo Cruz.

« C’est le mot “preuve” qui a provoqué la confusion », a jugé le pape pendant sa conférence de presse dans l’avion, ajoutant : « Entendre le pape leur dire en face : “Apportez-moi une lettre avec la preuve”, c’est une gifle. Et je me rends compte maintenant que mon expression n’a pas été heureuse, car je ne l’ai pas pensé ainsi. Et je comprends, comme dit l’apôtre Pierre dans une de ses lettres, l’incendie qui s’est déclenché. »

Sa maladresse reconnue, le chef de l’Eglise catholique a cependant maintenu sa position sur le fond, à savoir qu’il n’existait aucune preuve établissant que le prélat aurait couvert les agissements de M. Karadima et que, par conséquent, ces accusations sont bien des « calomnies ». « Le cas de l’évêque Barros, je l’ai fait étudier », a-t-il longuement expliqué, et « il n’y a pas de preuve de culpabilité et il semble qu’on ne va pas en trouver. Il y a une cohérence en sens inverse ». Or, a ajouté le pape, sans preuve, il n’est pas question de le condamner. Au terme des enquêtes conduites au sein de l’Eglise, « je suis convaincu qu’il est innocent », a ajouté François.

Quant à savoir pourquoi il ne croyait pas la parole des accusateurs de Mgr Barros, qui affirment qu’il avait été témoin des abus sans tenter de les arrêter, le pape a dit : « Je n’ai entendu aucune victime de Barros. Ils ne sont pas venus, ils ne se sont pas présentés, ils n’ont pas produit de preuve dans un procès. »

Interrogé sur la déclaration du cardinal américain Sean O’Malley, qui avait pris la défense, samedi, des victimes qui s’étaient senties offensées par la remarque du pape au Chili, le pontife a dit que cette déclaration avait été « très juste », et a fait observer que M. O’Malley lui reconnaissait la volonté de mettre en œuvre une « tolérance zéro » sur la pédophilie dans l’Eglise. Il a annoncé que la commission pontificale de protection des mineurs, créée pour trois ans en 2014 et que présidait l’archevêque de Boston, serait reconduite d’ici peu.