Jean-Claude Gaudin (à gauche) et Renaud Muselier à Marseille le 7 février 2014. / BERTRAND LANGLOIS / AFP

Renaud Muselier ne demandera pas à Jean-Claude Gaudin, le maire Les Républicains (LR) de Marseille et président de la métropole, de se retirer et d’abandonner ses mandats avant leurs termes, en 2020. « Je ne lui demanderai pas parce qu’il ne lâchera jamais », a répondu, jeudi 25 janvier, le président LR de la région Sud-Provence-Alpes-Côte d’Azur, à une question du Monde face à un parterre de journalistes. « Mais, s’il reste, qu’il le fasse au moins au service d’un projet et pas de microrapiéçages politiques », a poursuivi l’ancien premier adjoint de M. Gaudin, élu en sa compagnie en 1995, à la mairie de Marseille.

La veille, sur l’antenne de Public Sénat, Renaud Muselier avait lancé une violente diatribe contre son ex-partenaire politique, estimant qu’il avait été « un mauvais maire » pour Marseille et qu’il avait effectué « deux mandats de trop ». Jeudi, après avoir dressé le bilan de ses neuf premiers mois à la tête de la région Sud-PACA, M. Muselier a poursuivi son offensive.

« Je n’ai rien contre Jean-Claude Gaudin. J’aime Jean-Claude Gaudin. Mais j’ai un problème majeur avec le maire de Marseille », a-t-il insisté.

« Je déteste l’immobilisme »

Ce problème, pour M. Muselier, est avant tout incarné par « l’immobilisme » qu’il perçoit dans la gestion de sa ville. « Je déteste l’immobilisme. C’est un choix politique de gestion, d’administration… Ce n’est pas le mien. Je travaille avec le maire de Nice, je vois comment Nice évolue. Je travaille avec Toulon (…) Nous n’arrivons pas à travailler avec la mairie de Marseille et la métropole. Marseille mérite mieux », a-t-il dénoncé longuement.

En guise d’exemples, le président de la région Sud-PACA s’est étonné qu’aucun dossier déposé par la ville de Marseille n’ait réussi à être éligible aux financements européens – « 1 milliard d’euros en 2018 » – ou que M.Gaudin n’arrive pas à trouver un créneau pour signer avec lui le protocole de la dotation de 120 millions d’euros que la région a voté pour soutenir la métropole. « Vous voulez que je me taise devant ces dysfonctionnements ? », a-t-il demandé, avant de dénoncer « la petite musique du tout va bien ».

La double charge de Renaud Muselier sur le bilan de Jean-Claude Gaudin, qui vit son quatrième mandat à la tête de la ville, a des causes profondes. Le président de la région, qui a, un temps, quitté la politique, n’a jamais véritablement digéré le fait que M. Gaudin ne facilite pas la transition et ne lui cède pas son fauteuil après deux mandats. M. Muselier garde aussi une violente rancœur d’avoir vu le poste de président de la métropole marseillaise lui échapper en 2008, alors qu’il possédait la majorité des élus. Un cuisant échec dans lequel il voit encore la main habile de son aîné.

L’épisode Bruno Gilles a laissé des traces

Récemment, Renaud Muselier a mal vécu un épisode plus personnel. A l’automne dernier, Jean-Claude Gaudin a soudainement décrit Bruno Gilles, sénateur très proche de M. Muselier, comme celui qu’il aimerait bien voir lui succéder. Quelques semaines plus tard, M. Gilles a été hospitalisé pour de lourds problèmes cardiaques. Une pathologie que le président de la région, également médecin, estime liée à la brusque pression politique mise sur son ami. « [Jean-Claude Gaudin] nous a expliqué qu’il nommait Bruno, mon meilleur ami. Il l’a mis dans une situation difficile et je lui en veux beaucoup pour cette raison », a-t-il glissé jeudi, évoquant pour la première fois en public cet épisode.

Si la guerre est ouvertement déclarée, Renaud Muselier se positionne-t-il pour autant comme un candidat potentiel à la mairie de Marseille ? La question n’est pas tranchée. « Je suis président de la région Sud-PACA jusqu’en 2021 et j’entends bien le rester… Mais j’aime particulièrement ma ville », s’est-il contenté de répondre. Dans son entourage, on jaugeait jeudi avec plaisir le peu de réactions des élus marseillais face à aux attaques. « Pas grand-chose sur les réseaux sociaux, pas de déclarations outrées, notait le directeur de cabinet Jean-Philippe Ansaldi. On dirait que Renaud a ouvert la porte à une protestation que beaucoup partagent. » Si le président de la majorité LR-UDI-MoDem au conseil municipal de Marseille, Yves Moraine a évoqué des « paroles à la limite de la diffamation », l’heure était à la discrétion du côté des élus LR marseillais dont beaucoup siègent à la fois à la région et au conseil municipal. « Je n’ai pas pour habitude de répondre aux insultes, aux injures et aux outrances », a réagi Jean-Claude Gaudin sur Twitter.