La maire socialiste de Nantes (Loire-Atlantique), Johanna Rolland, le 26 août 2014. / JEAN-SEBASTIEN EVRARD / AFP

Mercredi 17 janvier, à l’annonce de l’abandon du projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes (Loire-Atlantique), elle a crié à la « trahison du grand ouest » et au « déni de démocratie ». Johanna Rolland, maire (PS) de Nantes, veut désormais organiser le « rebond » de la métropole. Samedi 20 janvier, elle a réuni les acteurs-clés de l’économie, du tourisme, de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Objectif : définir les priorités du territoire comme la nécessité de renforcer la connexion TGV avec Paris, l’aménagement d’une liaison ferroviaire Nantes-Rennes digne de ce nom, le financement d’un tramway desservant l’aéroport existant de Nantes-Atlantique… Pour le reste, Johanna Rolland n’a pas eu envie d’épiloguer sur les atermoiements du quinquennat Hollande, ni sur ceux de son ex-mentor Jean-Marc Ayrault qui, avant son passage à Matignon, a régné sur la ville durant près d’un quart de siècle.

Laurence Garnier, conseillère municipale LR ayant déjà annoncé sa candidature pour 2020, sonne, elle, volontiers la charge : « L’abandon de l’aéroport, c’est quand même l’échec d’Ayrault. Quand il a été nommé premier ministre, on s’est tous dit que c’était positif pour ce dossier. Mais il a réussi l’exploit de ne rien faire. Surtout, au plan local, il avait ouvert une brèche en s’alliant avec les écologistes : ça a toujours fait planer une ambiguïté. »

« Sage décision »

Le coup d’arrêt de Notre-Dame-des-Landes « marque la fin de l’ère Ayrault », selon Pascale Chiron, élue écologiste et troisième adjointe, avant de se souvenir : « Ce dossier a pourri l’ambiance au quotidien. » « Ayrault a été un très grand maire, assure Ronan Dantec, ancien adjoint, aujourd’hui sénateur écologiste. Mais il n’a jamais eu très envie de débattre de la question de l’aéroport. Il a relancé le projet quand il s’est aperçu que le plan d’exposition au bruit menaçait de planter l’urbanisation du quartier de l’Ile de Nantes. Une fois l’obstacle levé, il n’y avait plus besoin de cet équipement. Je ne comprends pas pourquoi il s’est entêté. »

Alain Gralepois, ex-premier secrétaire fédéral du PS en Loire-Atlantique, juge que l’arbitrage rendu par Edouard Philippe est une « sage décision ». Le débat sur l’aéroport, dit-il, est passé sous l’éteignoir au sein du PS local. « Peut-être pour des raisons de solidarité, avance M. Gralepois. Moins on en parlait, mieux c’était. Seuls les membres de la commission paysanne agricole du PS ont tenté de mettre le sujet sur la table. Mais c’est resté sans suite. Comme si l’affaire était classée. » « Moi, on ne m’a jamais dit de mettre la pédale douce sur ce thème », nuance Bassem Asseh, adjoint au maire en charge du dialogue citoyen.

Avant même la décision du gouvernement, François de Rugy, écologiste rallié au macronisme auquel des élus de tous bords prêtent des ambitions municipales à Nantes, raillait les incantations des « gloires » locales.

« M. Retailleau [ex-président des Pays de la Loire et actuel président du groupe LR au Sénat] semble oublier que son ami François Fillon a été premier ministre pendant cinq ans, confie le président de l’Assemblée élu, depuis 2007, avec le soutien du PS. Or, c’est durant cette période que la ZAD s’est enkystée. M. Ayrault, lui, a été juge et partie. En définitive, quand Hollande a stoppé l’opération d’évacuation de la ZAD en 2012, il a demandé à M. Ayrault de prendre un peu de recul. La mise en place d’une commission du dialogue a été actée et M. Ayrault n’a pas démissionné : c’est donc qu’il était d’accord avec l’arbitrage du président. »

« Nouvelle page »

« Objectivement, un premier ministre a énormément de responsabilités, note une voix importante du PS en Loire-Atlantique. L’enjeu de la France est plus important que tout. Mais il ne faut pas que Jean-Marc la ramène. Le dossier s’est enlisé quand il a été nommé à Matignon. Pour mettre fin à la grève de la faim des opposants à l’aéroport, il a promis de ne pas débuter immédiatement les travaux. »

« C’est la fin des années Ayrault, observe Ronan Dantec. Le logiciel d’aménagement de l’époque était un modèle de survie. Nantes venait de perdre ses chantiers navals, il s’agissait de concentrer les activités sur l’agglomération. Aujourd’hui, le territoire va bien, son attractivité n’est plus à démontrer. C’est le moment de jouer la carte du développement des villes moyennes. » Pascale Chiron, qui a recueilli 14,5 % des suffrages au premier tour du scrutin municipal en 2014 avant de fusionner avec la liste de Johanna Rolland, se projette elle aussi dans l’avenir : « Ce qui importe, c’est la nouvelle page que l’on va écrire. C’est un peu tôt pour savoir si chacun va s’y retrouver. Il faut aller de l’avant, ne pas traîner et jouer collectif. »