Federer, lors de sa demi-finale face au Sud-Coréen Chung Hyeon, le 26 janvier à Melbourne. / PETER PARKS / AFP

11 h 25, dimanche 28 janvier, heure française. Federer se redresse après s’être laissé tomber sur la Rod Laver Arena tel un pantin désarticulé. Il rejoint au filet Marin Cilic pour une accolade, le visage saisi dans un rictus d’excuse. Ne reste plus au Suisse qu’à nouer la montre de son compatriote d’horloger et de sponsor, avant de parcourir les quelques mètres qui le séparent encore de la coupe. Son vingtième titre du Grand Chelem.

Si tout ce qui précède relève de la pure – mais attendue – fantasmagorie, il est un fait que l’issue de l’Open d’Australie ne pourra que confirmer, une observation aussi banale qu’elle tient de l’historique : Roger Federer est le plus grand tennisman et l’un des plus fameux sportifs de tous les temps (en anglais the greatest of all time, « the GOAT », à ne pas confondre avec « the goat »).

30e finale en Grand Chelem

Passons rapidement sur les chiffres, indispensables repères d’une carrière débutée voilà près de vingt ans. A Melbourne, dimanche, « Rodgeur » disputera sa 30e finale en majeur et soulèvera – « peut-être » pour la beauté du sport, « sûrement » selon tout le reste – un 20e titre du Grand Chelem. Une dernière image ? Vendredi, l’ancien numéro un mondial a profité de l’abandon du jeune Chung Hyeon (Corée du Sud) pour remporter sa 43e demi-finale dans la catégorie reine des tournois de tennis. A raison de quatre majeurs disputés annuellement, le Suisse a connu l’équivalent de onze années quasi parfaites sur le circuit. Etourdissant.

A 36 ans, Federer réalise ce que personne n’avait jamais réussi dans un sport individuel : revenir au sommet de la hiérarchie mondiale, la trentaine bien entamée, face à des concurrents eux aussi déjà promis à la postérité (Djokovic, Nadal).

Quand il tape à nouveau la balle en janvier 2017, après six mois loin des courts pour soigner son dos et plus de quatre années vierges en Grand Chelem, le Bâlois est attendu pour une dernière pige en guise de tournée d’adieu. Le spectateur s’offre un ticket sur le central comme d’autres se laissent tenter par la « der des ders de chez der » d’Aznavour. Pour guetter quelques fulgurances éparses dont l’enchaînement offrait autrefois l’un des jeux les plus léchés de l’histoire de la balle jaune.

Six heures de moins sur le court

C’était sans doute mal connaître le bonhomme que de l’imaginer passer sur le billard pour préparer une sortie façon « âge tendre et raquette de bois ». FedEx est donc revenu pour se rappeler au bon souvenir d’une époque, peu connue des moins de 20 ans, où les tournois sur dur et gazon lui étaient promis et la terre battue négligée, chasse gardée de Nadal.

Open d’Australie et Wimbledon en 2017, avant un possible sixième trophée à Melbourne, dimanche : le Suisse est à nouveau le « maître », le favori. Celui dont le tableau est épié le tirage au sort à peine terminé, pour chasser le duel croustillant, le fameux « celui qui pourrait le titiller ».

La quinzaine australienne presque bouclée, et ses habituels challengers balayés (Djokovic, Nadal, Wawrinka) ou excusé (Murray), ne reste qu’un obstacle devant Federer : Marin Cilic. Le Croate, dont la victoire à l’US Open en 2014 reste mystérieusement méconnue, devra sortir services et coups droits – ses meilleures armes – létaux, puis compter sur une défaillance de son adversaire. Difficile sinon d’imaginer le fringant trentenaire, qui a passé six heures de moins sur les terrains australiens, privé d’un énième majeur.

Roger Federer-Marin Cilic, à suivre en direct sur Le Monde.fr, dimanche 28 janvier, à partir de 9 h 30.