« Ces applications et les données qu’elles collectent peuvent se révéler de véritables espionnes. » Mardi 30 janvier, un porte-parole du ministère français des armées a déclaré au Monde avoir « mis en garde les militaires contre les dangers en matière de sécurité » liés à l’application de jogging Strava.

Prisée des coureurs, mais aussi des cyclistes, cette appli américaine permet d’enregistrer ses trajets pour analyser et garder une trace de ses performances sportives. Or, utilisée par des militaires, elle peut fournir des informations sensibles sur l’emplacement des troupes et certaines de leurs activités. C’est ce qui dénoncé ces derniers jours par plusieurs observateurs, quelques semaines après la mise en ligne, par Strava, d’une carte mondiale agrégeant les séances de jogging de ses millions d’utilisateurs.

« Nous avons fait un rappel en interne de la nécessité de respecter les règles élémentaires de sécurité en opération, par exemple déconnecter les objets, comme les montres, les iPhone ou encore Strava », souligne le ministère des armées.

« Quand les militaires arrivent en opération, ils sont informés des règles de sécurité, notamment relatives aux réseaux sociaux. On les met en garde, notamment les jeunes. Sur Facebook, par exemple, on leur dit de faire attention aux informations sensibles. Avec Strava, on en a remis une couche. »

Strava prend le problème « très au sérieux »

L’armée états-unienne a elle aussi réagi lundi dans les colonnes du Washington Post, annonçant que les règles liées à l’utilisation de ce type d’applications seraient « affinées ». Certaines bases américaines situées en Irak ou en Syrie ressortaient particulièrement sur la carte publiée par Strava. Le service de presse du commandement de l’armée américaine au Moyen-Orient a aussi dit au quotidien que les commandants des bases avaient été invités à renforcer l’application des règles déjà existantes.

« Le développement rapide de nouvelles technologies innovantes améliore la qualité de nos vies mais représente également de potentiels défis pour la sécurité opérationnelle et la protection de nos forces », a-t-il souligné dans un communiqué. « Ces technologies sont interdites sur certains sites de la coalition et durant certaines activités. »

De son côté, le président-directeur général de Strava, James Quarles, a publié lundi une lettre ouverte, dans laquelle il affirme prendre « très au sérieux » le sujet. Il s’engage notamment à « travailler avec les représentants de l’armée et du gouvernement au sujet des données potentiellement sensibles ».

M. Quarles a aussi annoncé une remise à plat des fonctionnalités liées aux données personnelles, « pour s’assurer qu’elles ne puissent pas être compromises par des personnes mal intentionnées ». Le PDG promet notamment de simplifier les réglages et de faire en sorte que les utilisateurs soient mieux informés. « Nous comprenons nos responsabilités en ce qui concerne les données que vous partagez avec nous », a-t-il assuré.

En revanche, Strava n’a pas jugé bon de supprimer la carte à l’origine de la polémique, qui était toujours en ligne mardi matin.