Documentaire sur France 2 à 23 h 05

Après celui des hauts dignitaires nazis s’ouvrait à Nuremberg, le 9 décembre 1946, sous l’autorité des Américains, un deuxième procès dans lequel comparaissaient vingt-trois médecins, infirmiers et administratifs accusés entre autres de crime contre l’humanité. Ce procès, Michel Cymes l’a choisi comme fil rouge et cadre visuel d’Hippocrate aux enfers : un documentaire qui reprend, pour l’essentiel, le propos de son ouvrage publié chez Stock en 2015, dans lequel il tentait de comprendre, à travers leur parcours, comment des praticiens et hommes de science avaient, en conscience, bafoué le fameux serment.

Piqûre de rappel

Quand il n’est pas filmé l’air grave et pénétré à Auschwitz ou au camp du Struthof, Michel ­Cymes appelle au prétoire les principales figures de l’horreur médicale ­nazie. A travers Karl ­Gebhardt, chargé de l’« Opération T4 » visant à exterminer les handicapés mentaux, Carl Clauberg, gynécologue spécialiste de la stérilité officiant à Auschwitz et Ravensbrück, ou encore Joseph Mengele, ce documentaire détaille les différents types d’expérimentations menées à des fins militaires ou eugéniques sur des déportés. Avec en support de multiples archives – dont des témoignages de rescapés – et l’éclairage d’historiens allemands, britanniques et français. Ceux d’Yves Ternon et de Johann Chapoutot sur le ­régime et l’idéologie nazis n’étant pas les moins précieux au milieu de ce film truffé d’effets inutiles.

Salle du bloc 10 à Auschwitz. / FRANCE 2

Car si l’intention de Michel ­Cymes de prodiguer, après son ­livre, une piqûre de rappel est louable, que n’a-t-il visionné auparavant les excellents documentaires d’Emil Weiss (Criminal Doctors, Auschwitz) ou de ­Catherine Bernstein (T4, un médecin sous le nazisme). Il y aurait appris la nécessaire sobriété, tant dans le commentaire que la mise en images, qu’appelle ce sujet. Et un réel point de vue d’auteur. Toutes choses qui manquent cruellement à ce film boursouflé d’emphase et de grandiloquence. Sans parler d’une animation « gadget » des archives et d’une incarnation vaine. Le tout surligné par la musique du Quatuor Capuçon, dont des plans serrés agrémentent fréquemment le film jusqu’à l’exaspération, lui faisant perdre une bonne part de sa portée ­pédagogique.

Hippocrate aux enfers, de Jean-Pierre Devillers (Fr., 2017, 80 min).