Elle sont quatre lycéennes, dans l’entrée du grand hall d’Eurexpo à Lyon. Plan en main, elles cherchent leur voie dans les multiples stands du Mondial des métiers, où environ 120 000 visiteurs sont attendus jusqu’à dimanche 4 février. « Je sais quelles matières m’intéressent, j’aime le domaine scientifique, j’aurais envie d’aider les autres, la médecine pourquoi pas ? Il y a des choses que j’élimine pour faire mon choix », explique Emma, 16 ans, élève en première S, à La Boisse, dans l’Ain. Sa camarade Alix, 17 ans, a une idée plus arrêtée : « Je voudrais être chirurgien neurologue. » Et explique ce désir de soigner les affections neurologique par le décès brutal de son grand-oncle, d’un AVC. Sarah et Camille recherchent, elles, des filières générales, en attendant de préciser leur avenir professionnel.

« Il n’y a pas de règle, chaque élève construit son parcours en fonction de sa personnalité, de son environnement familial, confirme Stéphane Saissac, 47 ans, professeur au lycée technique de la Mache à Lyon. Souvent, des proches leur parlent d’un métier, ils réalisent lors d’un stage qu’il n’est pas fait pour eux. Je pense qu’il faut faire la démarche inverse, partir d’une idée un intérêt pour le bois, les matériaux par exemple et se demander à quel métier on peut l’associer. » Venu avec un groupe d’élèves de troisième pré-pro, en pleine période d’orientation, l’enseignant dit l’importance des stages et des journées d’orientation, et de « donner du sens et de la confiance, en aidant les jeunes à arbitrer progressivement entre leurs envies et la réalité, en fonction de leur tempérament ».

« Le système éducatif met un peu la pression pour choisir les filières dès la seconde, ce n’est pas simple, on est dans le flou »

Véronique Dumestre, 47 ans, et son fils Léon, 15 ans et élève en filière scientifique, ont fait un arrêt au « village de la chimie ». « Le système éducatif met un peu la pression pour choisir les filières dès la seconde, ce n’est pas simple, on est dans le flou, même s’il n’y a pas de problème scolaire », confie la maman. Face à eux, un groupe d’étudiants en blouses blanches présentent leur école d’ingénieurs, en fabricant sur place un dentifrice. Ils rassurent et expliquent que le choix peut se faire au fil des études. « J’étais attirée par les sciences, j’ai fait un DUT pour avoir un diplôme en attendant savoir quoi faire exactement, je n’ai pas encore d’idée précise, j’écarte ce qui me déplaît », raconte Anaelle, 20 ans. Sa camarade Tsoline procède aussi par élimination : « Je sais ce que je ne veux pas faire : de l’analyse en laboratoire. Tout le reste est ouvert, on a le choix. »

« Contredire ou dépasser ses parents »

Avoir une idée de métier très précise n’est d’ailleurs pas forcément souhaitable. Un conseiller d’orientation se souvient d’un lycéen auquel avait été suggéré le métier d’avocat, « parce qu’il parlait bien ». Un choix qui, après discussion, ne semblait pas forcément judicieux. « Quand les élèves viennent avec une idée de métier, on analyse d’abord leur demande pour savoir si c’est vraiment un choix personnel. On raisonne plutôt en terme de filière », explique une conseillère d’orientation présente au Mondial, qui insiste sur « la difficulté d’exprimer un choix, de contredire ou dépasser ses parents ».

Dans les faits, collégiens et lycéens préfèrent en majorité raisonner par domaines d’activité, et donc par filières, en resserrant leurs choix progressivement. « Les parents posent des questions sur les débouchés, les enfants s’intéressent plus aux programmes. Ils sont pleins d’envies et en même temps plein d’appréhensions, la clé pour les guider, c’est leur montrer des champs d’application concrets », constate Mireille Climent, 48 ans, intervenante pour Unitex, union professionnelle du textile, « il y a quinze ans, les jeunes faisaient ce que les parents disaient de faire, les choses s’ouvrent ».

Des secteurs d’activité à l’image négative

Devant un stand de métiers culinaires, Evan, 16 ans, raconte qu’il vient d’abandonner le lycée, à Ambérieux, dans l’Ain, pour devenir cuisinier. « J’en avais ras le bol des cours, on m’avait mis dans une filière technologique, j’ai toujours aimé la cuisine » dit-il avec beaucoup de sérénité. A ses côtés, sa mère le soutient pleinement : « On a eu une grande discussion, je ne pouvais plus le voir malheureux en cours, les parents ne doivent pas forcer les enfants à poursuivre des études quand ils ne sont pas bien. »

Mais d’autres visiteurs du salon évoquent l’image négative qui colle à la peau de certains secteurs d’activités et formations techniques. « Les familles ont encore le réflexe de filière générale et empêchent leurs enfants de prendre des voies qui les intéressent, les mentalités doivent encore évoluer », témoigne Chantal Colombet, 58 ans, professeure de technologie dans un lycée professionnel de Rive-de-Giers, dans la Loire.

Cheminement progressif

Pour Laurette, 21 ans, le cheminement a ainsi été progressif. « Au début, j’avais une idée d’un groupe de métiers, un domaine d’activité, je n’ai pas osé aller tout de suite vers le dessin. J’ai fait une licence de biologie, j’ai pensé ensuite à faire de l’illustration scientifique, maintenant les choses se précisent », explique cette élève de la prestigieuse école d’art Emile-Cohl, qu’elle est venue présenter à Eurexpo.

A une collégienne qui lui raconte : « J’aime bien le droit, le commerce, être en contact avec les gens, mais je ne sais pas quel métier choisir », Alexia Rebuffaud, 18 ans, elle-même élève en BTS technico-commercial à Passy, en Haute-Savoie, répond, confiante : « Management, comptabilité, marketing, commercial... En apprenant des compétences, on se donne le choix, il ne faut pas s’inquiéter. »

Participez à « O21 / S’orienter au 21e siècle »

Pour aider les 16-25 ans, leurs familles et les enseignants à se formuler les bonnes questions lors du choix des études supérieures, Le Monde organise la seconde saison d’« O21 / S’orienter au 21e siècle », avec cinq dates : après Nancy (vendredi 1er et samedi 2 décembre 2017, au centre Prouvé) et Lille (vendredi 19 et samedi 20 janvier 2018, à Lilliad), rendez-vous à Nantes (vendredi 16 et samedi 17 février 2018, à la Cité des congrès), avant Bordeaux ( vendredi 2 et samedi 3 mars 2018, au Rocher de Palmer à Cenon) et Paris (samedi 17 et dimanche 18 mars 2018, à la Cité des sciences et de l’industrie).

Dans chaque ville, les conférences permettront au public de bénéficier des analyses et des conseils, en vidéo, d’acteurs et d’experts, et d’écouter et d’échanger avec des acteurs locaux innovants : responsables d’établissements d’universités et de grandes écoles, chefs d’entreprises et de start-up, jeunes diplômés, etc. Des ateliers sont aussi prévus.

Il reste des places pour participer à O21 Nantes ! Pour toutes les villes, les inscriptions se font gratuitement via ce lien.

En images : les temps forts d’O21, nos conférences pour s’orienter au 21e siècle, à Nancy

Pour inscrire un groupe de participants, merci d’envoyer un e-mail à education-O21@lemonde.fr. L’éducation nationale étant partenaire de l’événement, les lycées peuvent organiser la venue de leurs élèves durant le temps scolaire.