L’entrée de la mosquée As Sounna, à Marseille, le 1er décembre. / BORIS HORVAT / AFP

Le ministère de l’intérieur a engagé, à la fin de janvier, une procédure d’expulsion du territoire contre El Hadi Doudi, imam algérien de la mosquée salafiste marseillaise As Sounna, dont la fermeture administrative pour six mois a été confirmée, mercredi 31 janvier, par le Conseil d’Etat. En dépit de la présence à Marseille durant plus d’une trentaine d’années de cet imam présenté comme une référence du salafisme, cette procédure apparaît comme une suite logique de la procédure de fermeture du lieu de culte. Le Conseil d’Etat relève ainsi que, « à travers [ses] prêches, l’imam El Hadi Doudi a diffusé des appels à la haine et à la violence contre les chrétiens, les juifs, les chiites et les personnes adultères », de même qu’il « légitime et glorifie le djihad ».

Le ministère n’a pas utilisé la procédure d’expulsion en urgence absolue. Bénéficiant de « protections légales » – durée du séjour en France, père d’enfants français –, El Hadi Doudi est convoqué le 8 février devant la commission départementale d’expulsion des étrangers, qui rendra un simple avis ; la décision d’éloignement revenant au ministre de l’intérieur.

Dans une note blanche datée du 3 novembre versée à la procédure administrative, les services de renseignement justifient l’emprise du salafisme à Marseille par une quinzaine d’années de « prosélytisme patient et continu de l’imam Doudi ». Ce chef religieux exercerait son influence sur une vingtaine de mosquées dans les Bouches-du-Rhône et sur des lieux de culte ailleurs en France.

« Que des salafistes convaincus »

« Jamais en trente-sept ans je n’ai fait parler de moi », avait déclaré au Monde El Hadi Doudi, 63 ans, au lendemain de la fermeture de la mosquée, le 15 décembre. L’imam se défend d’appels à la haine et à la violence : « On n’est pas une secte. On est salafis, c’est la religion du Prophète, ce n’est pas une mouvance islamiste radicale. » Il démentait professer un islam radical et rigoriste : « J’ai trois fils qui sont mariés à des Françaises, l’une de mes belles-filles est chrétienne, une autre est d’origine juive. Leurs parents viennent à la maison. Si j’étais dans la radicalisation qu’on me prête, je ne les accueillerais pas chez moi. »

Arrivé à Marseille en 1981, il avait assuré les prêches dans plusieurs lieux de culte marseillais dont la vaste mosquée Islah du marché aux puces avant d’ouvrir, en 1999, As Sounna au cœur du 3e arrondissement, le plus pauvre de la ville. Dès 2011, dans un rapport, les renseignements généraux précisaient que « la mosquée de l’imam Doudi, en bas du boulevard National, n’accueille que des salafistes convaincus ».

Avant sa fermeture, les prêches de l’imam Doudi rassemblaient près de huit cents fidèles le vendredi. Un lieu d’enseignement de l’islam avait été ouvert dans un local mitoyen à la mosquée. M. Doudi a fédéré autour de lui un certain nombre de fidèles, à l’image de Moussa, 30 ans. Vêtu d’un qamis bleu, le jeune homme expliquait récemment être venu s’installer dans le quartier afin de se rapprocher de la mosquée. « Le djihad, assure-t-il, on s’écarte de ces choses-là, le cheikh [Doudi] nous a mis en garde. »