Le tableau avait été exposé pour la dernière fois à Lagos en 1975. / PETER NICHOLLS / REUTERS

Après plus de quarante ans de mystère, la « Mona Lisa africaine » est réapparue. Ce tableau représentant le portrait d’une Nigériane a été retrouvé dans un appartement de Londres et sera prochainement mis aux enchères, a-t-on appris mercredi 7 février.

Ce portrait de la princesse Ife Adetutu Ademiluyi, surnommée « Tutu », peint en 1974 par l’artiste nigérian Ben Enwonwu, sera mis en vente le 28 février par la maison d’enchères Bonhams, une vente retransmise en direct à Lagos pour permettre aux acheteurs potentiels de se manifester.

« Symbole d’espoir »

Le portrait fut perdu de vue après sa dernière exposition, en 1975. « Depuis quarante ans, c’est une peinture légendaire, tout le monde en parle, se demande où est “Tutu” ? », a rappelé le romancier nigérian Ben Okri, lauréat du Booker Prize.

« L’artiste n’a pas simplement représenté la jeune fille, il a représenté toute la tradition. C’est un symbole d’espoir et de régénération au Nigeria, le symbole du phénix renaissant de ses cendres. »

Ben Enwonwu a peint trois versions de Tutu, mais les trois tableaux avaient disparu jusqu’à ce que l’un d’eux soit retrouvé par Giles Peppiatt, directeur de l’art moderne africain chez Bonhams. Des particuliers l’avaient contacté après le succès de ventes d’art nigérian.

« Dès que je l’ai vu, j’ai su »

« Je suis entré dans cet appartement londonien et je l’ai vu accroché au mur, c’était à peu près la dernière chose que je m’attendais à voir, raconte Giles Peppiatt. Dès que je l’ai vu, j’ai su que c’était l’authentique, mais je ne pouvais pas dire ça aux propriétaires à l’époque, car on ne peut pas juste dire ça. »

Une fois la découverte authentifiée, la famille, « sans surprise, a été assez stupéfaite ». Le portrait, exposé pour la dernière fois à l’ambassade d’Italie à Lagos, avait été acheté par le père de famille lors d’un voyage d’affaires.

« Lancer le débat »

Selon Giles Peppiatt, l’artiste « était secrètement amoureux de son modèle, une très jolie femme ». Le tableau « est assez audacieux, avec la lumière sous le menton, qui attire l’attention sur la tête », décrit-il.

Le tableau est estimé entre 200 000 et 300 000 livres (226 000 à 339 000 euros). Mais pour Ben Okri, sa valeur est plus que financière. Cela va « lancer le débat », estime-t-il : les peintres africains n’ont « jamais eu » l’attention qu’ils méritent, selon lui. « C’est l’œuvre parfaite pour commencer » à se demander pourquoi, ajoute-t-il.