Au siège de la Société générale de La Défense, près de Paris, en avril 2016. / Gonzalo Fuentes / REUTERS

L’année 2017 restera à plus d’un titre une année difficile pour la Société générale. La mauvaise nouvelle la plus retentissante concerne le bras de fer engagé avec l’administration fiscale dans le cadre de l’affaire Kerviel.

Le groupe a en effet profité de la publication de ses comptes annuels, jeudi 8 février, pour lever en partie le voile sur le risque de redressement fiscal de 2,2 milliards d’euros qu’elle encourt.

Pour mémoire, dans cette affaire de fraude commise par l’ex-tradeur Jérôme Kerviel, qui aura coûté 4,9 milliards d’euros à la banque française après sa mise au jour en 2008, un arrêt de la cour d’appel de Versailles du 23 septembre 2016 a conclu à une responsabilité partagée entre M. Kerviel et la Société générale dans ce scandale, du fait de « manquements » dans les procédures de contrôle au sein de l’établissement. Une conclusion de nature à remettre en cause l’octroi du crédit d’impôt de 2,2 milliards d’euros accordé à la banque, au titre du régime fiscal applicable aux sociétés déficitaires victimes de fraudes.

Déduire la perte Kerviel ?

A la toute fin du communiqué portant sur ses résultats annuels, la Société générale indique que « l’administration fiscale (…) a récemment confirmé qu’elle envisageait de remettre en cause la déductibilité de la perte occasionnée par les agissements de Jérôme Kerviel ». Mais la banque estime que « cette proposition de rectification est sans effet immédiat et devra éventuellement être confirmée par une notification de redressement adressée par l’administration fiscale lorsque Société générale sera en situation d’imputer les déficits reportables issus de la perte sur son résultat imposable ».

Or, selon les prévisions de la banque, « une telle situation ne se produira pas avant plusieurs années ». Si, le moment venu, l’administration décidait bel et bien de notifier le redressement, « le groupe Société générale ne manquerait pas de faire valoir ses droits devant les juridictions compétentes ». La menace apparaît donc encore lointaine et, en attendant, la banque a décidé qu’il n’y avait pas lieu de passer des provisions dans ses comptes.

Recul d’un milliard

Quant à ses résultats, la Société générale a enregistré en 2017 un bénéfice net en recul de plus d’un milliard par rapport à celui de 2016. Soit 2,8 milliards contre 3,9 milliards d’euros un an plus tôt. A chaque trimestre, le résultat a été inférieur à celui de l’année précédente, en raison des taux bas qui ont pesé sur son activité de banque de détail, de l’atonie des marchés l’été dernier, puis, en fin d’année, d’une série d’éléments exceptionnels.

La première de ces charges exceptionnelles concerne la réorganisation de ses réseaux de banque de détail en France, dans le cadre de son nouveau plan stratégique pour 2020, présenté le 28 novembre dernier. La suppression de plus d’une centaine d’agences et de 900 postes (en complément des 2 550 suppressions de postes déjà annoncées début 2016) va en effet se traduire par une charge de 390 millions d’euros pour l’établissement. S’y ajoutent les effets des réformes fiscales aux Etats-Unis (-253 millions d’euros) et en France (-163 millions), ainsi qu’un contrôle fiscal et une amende sur la dématérialisation du traitement des chèques (-205 millions).

Litiges avec les Etats-Unis

Enfin, la banque encourt le risque de s’acquitter de lourdes amendes aux Etats-Unis en raison de plusieurs litiges : les affaires du taux interbancaire Libor, du fonds souverain libyen « Libyan Investment Authority » et du non-respect des embargos américains. Au moins l’un de ces dossiers devrait d’ailleurs se dénouer dans les prochaines semaines. Dans cette perspective, Société générale a décidé au quatrième trimestre 2017 de doter de 200 millions d’euros supplémentaires sa provision globale amassée dans la perspective du règlement de ces procédures. Ce qui porte désormais le montant de cette enveloppe à 2,32 milliards d’euros.

L’ensemble de ces éléments ont contribué à faire chuter le bénéfice net du groupe au quatrième trimestre, à 69 millions d’euros, contre 390 millions sur les trois derniers mois de 2016. Cette médiocre performance a d’ailleurs fait reculer le ratio de solvabilité de la banque à 11,4 % à fin 2017, contre 11,5 % à fin 2016, dans la mesure où la banque a maintenu sa politique de distribution de dividendes.

Ce résultat trimestriel se situe toutefois largement au-dessus du consensus des analystes, qui avaient anticipé une perte. Les bonnes surprises sont venues d’un niveau toujours très faible du coût du risque (les provisions passées pour faire face aux risques de crédits non remboursés) et de bonnes performances des activités de banque de détail à l’international, notamment en Russie et en Roumanie.