Un magasin Tesco du quartier de Hammersmith, dans le Grand Londres, le 3 octobre 2012. / Paul Hackett / Reuters

Qui apporte le plus de valeur à Tesco, le groupe britannique de supermarchés : une caissière qui travaille dans un magasin ou un manutentionnaire qui range les marchandises dans un entrepôt ? Aucun des deux, répond Paula Lee, avocate au cabinet Leigh Day : « la question ne devrait vraiment pas se poser, ils contribuent de la même manière aux vastes profits de Tesco. »

Et pourtant, les salaires de l’enseigne britannique disent le contraire. En moyenne, les employés qui travaillent dans les magasins sont payés 8 livres de l’heure (9 euros), contre 11 livres pour ceux qui sont employés dans les centres de distribution. Or, les premiers sont très majoritairement des femmes, tandis que les seconds sont essentiellement des hommes. Si l’entreprise paie de la même façon les hommes et les femmes qui font exactement le même travail, elle a laissé des écarts de rémunération s’immiscer entre ces catégories.

Sur cette base, une centaine de caissières ont engagé, mercredi 7 février, une procédure judiciaire, pour demander compensation. La facture pourrait s’envoler pour Tesco. Si les caissières gagnent, la décision pourrait s’appliquer à environ 200 000 employés, la loi permettant de revenir six ans en arrière. Soit jusqu’à 4 milliards de livres (4,5 milliards d’euros) de compensation au total, selon les calculs de Leigh Day, qui représente les plaignantes.

Il ne s’agit que de la toute première étape d’une bataille judiciaire qui devrait durer plusieurs années. Dans un premier temps, les deux parties doivent essayer de trouver un terrain d’entente auprès de l’ACAS, un service d’arbitrage des conflits du travail.

Leigh Day n’en est cependant pas à son coup d’essai. Le cabinet d’avocats a entamé des procédures similaires contre Asda et Sainsbury’s, deux autres grandes chaînes de supermarchés, enrôlant 20 000 plaignants. En juin 2016, le tribunal de l’emploi a tranché en faveur des caissières d’Asda, estimant que leur travail était d’une valeur équivalente à celui de leurs confrères des entrepôts. L’enseigne fait appel.

L’argument de la « valeur similaire » d’emplois différents avait été utilisé avec succès contre la mairie de Birmingham. Les dames des cantines s’étaient érigées contre les salaires des éboueurs, estimant qu’il n’y avait aucune raison que ces derniers soient mieux payés. La cour suprême leur a donné gain de cause en 2013, condamnant la mairie à verser 757 millions de livres (850 millions d’euros) de compensation.