Koji Shinasaka

Les Japonais ne manquent pas de montagnes, ni de traditions, légendes ou esprits farceurs pour les habiter. L’animisme plus ou moins bon enfant que véhicule le shintoisme, la religion dominante de l’archipel, est une ressource inépuisable pour l’imaginaire. De là découle une production assez importante de manga sur le sujet, depuis le très classique Sommet des dieux de Jiro Taniguchi, jusqu’au plus réçent Vertical de Shinichi Ishizuka. C’est dans cet univers minéral que Koji Shinasaka fait évoluer le récit de Monkey Peak.

Célèbre pour ses récits traitant du jeu de Mahjong, avec quelques séries (non traduites) qui font référence dans ce domaine (Tohai, en 16 volumes), le mangaka japonais n’en est pas à sa première expérience. Il sort avec Monkey Peak de son périmètre narratif habituel, tout en traitant une thématique commune, celle des interactions sociales collectives dans l’entreprise.

Planche de "Monkey Peak" de Koji Shinasaka et Akihiro Kumeta / Editions Komikku / Koji Shinasaka

Ceux qui s’attendent à voir un pur moment de grimpe contemplative seront déçus. La montagne n’est ici que purement instrumentale, un obstacle dangereux à surmonter, avec ses difficultés et ses enjeux. Mais l’essentiel de l’histoire relèvera moins du dépassement de soi, avec ses clichés, que de la confrontation inattendue avec un obstacle imprévu : un singe géant et meurtrier qui semble n’avoir pour seul objectif que de décimer à la machette le groupe de marcheurs de notre histoire. Un pur scénario de « survival ».

Koji Shinasaka

On est donc loin d’un « seul à seul » face à la nature. Le manga de Shinasaka est même plutôt peuplé : une quarantaine de marcheurs se retrouvent ainsi au pied de la montagne Shirabi, dans les Alpes japonaises, pour un exercice « corporate » de « team building », destiné à renforcer les liens entre les salariés d’une société pharmaceutique en difficulté. La trame narrative s’avère assez simple, mais elle est sauvée par la peinture assez fine de portraits psychologiques distincts des différents membres de l’expédition. En découle une belle série au vitriol de comportements individuels et de la manière dont les conditionnements sociaux peuvent se modifier sous la pression d’événements extrêmes.

Planche de "Monkey Peak" de Koji Shinasaka et Akihiro Kumeta / Editions Komikku / Koji Shinasaka

C’est réaliste, et dessiné d’un trait tout aussi réaliste par Akihiro Kumeta. La série est toujours en cours au Japon avec quatre volumes publiés. On espère juste une suite un peu moins prévisible que le scénario de ce premier volume.

Monkey Peak, volume 1, de Koji Shinasaka et Akihiro Kumeta. Ed. Komikku, 228 pages, 8,50 €