Ils veulent faire démonter les box vitrés, de plus en plus nombreux dans les tribunaux, au nom de la présomption d’innocence : la demande déposée par des avocats de toute la France a été déclarée irrecevable, lundi 12 février, par le tribunal de grande instance de Paris.

Le Syndicat des avocats de France (SAF) avait assigné pour « faute lourde » la ministre de la justice et l’agent judiciaire de l’Etat, une demande à laquelle se sont joints les principales organisations et syndicats de la profession, ainsi qu’une vingtaine de barreaux à travers la France.

Venus de Toulouse, Strasbourg, Nanterre ou Paris, des avocats, dont le pénaliste Henri Leclerc, s’étaient relayés pendant quatre heures le 15 janvier devant la première chambre civile pour dénoncer une atteinte à la présomption d’innocence, aux droits de la défense et à la dignité humaine.

En retour, l’avocat de la chancellerie avait avancé que le tribunal était incompétent, arguant que seule la justice administrative, et donc le tribunal administratif, pouvait trancher ce litige.

Généralisation de ces dispositifs

Dans sa décision lundi, le tribunal n’a pas suivi ces arguments et s’est déclaré compétent. En revanche, il a déclaré les demandes des avocats irrecevables, estimant que seuls les « usagers du service public de la justice » pouvaient le cas échéant faire condamner l’Etat pour « faute lourde ». Les avocats, en tant qu’« auxiliaires de justice », ne peuvent donc faire une telle demande, dit en substance le tribunal.

Depuis plusieurs décennies, des box plus ou moins vitrés ont été installés dans des juridictions françaises. Mais un arrêté datant d’août 2016 a acté une généralisation de ces dispositifs, dans le but déclaré d’éviter évasions et violences lors des audiences. Selon les propres chiffres du ministère de la justice, il y n’a eu pourtant, en 2016, que 88 incidents d’audience pour 700 000 procès, chiffre qui inclue les incidents extérieurs à la salle d’audience.

La France construit des « cages » dans les tribunaux. Voilà pourquoi cela pose problème.
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Ainsi, une vingtaine de box ont notamment été construits depuis l’été 2017 en région parisienne : des cubes vitrés, au plafond grillagé, sans porte donnant sur la salle mais comportant des fentes et des micros pour permettre au justiciable d’être entendu.

Depuis l’automne, des avocats et magistrats ont exprimé leur opposition à ces constructions, poussant la garde des sceaux, le 22 décembre, à geler l’installation de nouveaux box et à demander un état des lieux des équipements déjà installés.

En dehors du TGI de Paris, d’autres procédures sont en cours à Versailles, Nanterre et auprès du Conseil d’État. Le défenseur des droits et la contrôleuse générale des lieux de privation de liberté ont aussi été saisis.

Pourquoi la France construit-elle des « cages » dans les tribunaux ?
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