Neymar, le 10 février, à Toulouse. / REMY GABALDA / AFP

En cas de qualification, les observateurs diront qu’il a tenu son rang. A contrario, en cas d’élimination, il sera perçu comme le coupable idéal. Neymar da Silva Santos Junior, 26 ans, est attendu au tournant, mercredi 14 février, à Santiago Bernabeu, lors de la réception du Paris-Saint-Germain par le Real Madrid, en huitièmes de finale aller de Ligue des champions. Premier acte d’une double confrontation, dont la manche retour est programmée le 6 mars au Parc des princes.

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Ces dernières semaines, tout a été écrit sur la réception hors normes organisée par l’attaquant brésilien du PSG à l’occasion de son anniversaire, son absence lors du match à Sochaux qui a suivi la fête, son prétendu désir de quitter cette si peu attrayante Ligue 1 pour rejoindre le Real Madrid l’été prochain, le « penaltygate » et son bras de fer avec son partenaire Edinson Cavani… Le déplacement de l’équipe parisienne à Madrid a le mérite de replacer le principal actif du PSG dans une pure logique sportive et économique.

Neymar, un mauvais souvenir pour le Real

Joueur le plus cher de l’histoire du football, recruté contre 222 millions d’euros l’été dernier, l’ex-attaquant du FC Barcelone a, jusqu’à présent, justifié son statut dans la capitale. Avec 18 buts inscrits en Ligue 1, six banderilles plantées en Ligue des champions, et une myriade de passes décisives à son compteur, Neymar a lustré le jeu parisien tout en enfilant les casquettes d’animateur, de patron et d’ambassadeur de l’équipe entraînée par Unai Emery.

Ces dernières semaines, l’artiste a donné l’impression de s’amuser sur les terrains de Ligue 1. Il paraît dans une forme optimale avant de retrouver le « paquebot » de Bernabeu, où il a toujours laissé de mauvais souvenirs aux Merengue lors de sa parenthèse catalane. Avec trois buts, cinq passes décisives et quatre victoires face au Real, Neymar a régulièrement mis au supplice la défense madrilène.

« Ce serait une erreur de nous concentrer uniquement sur Neymar, a estimé, la veille du match, son compatriote et ami Marcelo, vice-capitaine du Real. Nous ne pensons pas qu’à lui. Et pas seulement non plus aux trois de l’attaque [Cavani, Neymar, Mbappé]. C’est le PSG dans son ensemble dont nous devons nous méfier. Nous savons parfaitement ce que nous devons faire. »

Dans la capitale espagnole, le duel à distance entre Neymar et le quintuple Ballon d’or Cristiano Ronaldo, 33 ans, sera toutefois particulièrement épié. Alors qu’il figure parmi les quatre joueurs (avec Thiago Motta, Dani Alves et Angel Di Maria) de l’effectif parisien à avoir remporté la Ligue des champions, le Brésilien espère supplanter médiatiquement son aîné portugais, meilleur buteur de l’histoire du Real (427 réalisations depuis 2009). D’où l’idée d’un passage de témoin qui se dessine avant cette joute.

« Neymar a l’obligation de briller »

Sur un plan économique et commercial, la performance du prodige brésilien contre le Real aura des répercussions évidentes pour le PSG, propriété depuis 2011 du fonds Qatar Sports Investments (QSI). En recrutant le natif de Mogi das Cruzes (région de Sao Paulo), les dirigeants parisiens ont fixé à leur entraîneur comme objectif minimal de hisser l’équipe en demi-finale du tournoi. Et surtout d’effacer les stigmates de la douloureuse élimination (0-4, 6-1) en huitièmes de finale, en mars 2017, contre le FC Barcelone, alors emmené par Neymar. En clair, le no 10 a pour mission d’exploser le plafond de verre qui circonscrit jusqu’à présent les visées européennes du PSG, incapable d’aller au-delà des quarts depuis son rachat par QSI.

« Neymar a l’obligation de briller à l’occasion de la double confrontation contre le Real, voire au-delà, car justement il a été recruté pour être le joueur qui ferait basculer le PSG dans une nouvelle dimension, ce que n’était pas Zlatan Ibrahimovic, estime Christophe Lepetit, économiste au Centre de droit et d’économie du sport de Limoges. Il y a donc une très forte pression sur lui pour tirer le PSG vers le haut et être ce fameux marquee player [footballeur star mais aussi décisif] que QSI attend depuis 2012. »

Visés par une enquête de l’Instance de contrôle financier des clubs dans le cadre du fair-play financier (FPF), les dirigeants du PSG espéraient que le recrutement de Neymar leur permettrait de revoir à la hausse ses contrats de sponsoring (Nike, Emirates) et d’augmenter leurs revenus (486 millions d’euros, à l’issue de la saison 2016-2017, selon le classement annuel de la Football Money League, établi par le cabinet d’audit Deloitte). S’ils doivent générer 75 millions de revenus d’ici le 30 juin, date de clôture de ses comptes pour être dans les clous du FPF, les hiérarques de QSI misent d’autant plus sur une belle performance de Neymar lors de cette double confrontation contre le Real Madrid.

Edinson Cavani et Neymar. / Christophe Ena / AP

Le rayonnement de la marque PSG

« Les répercussions d’une qualification seraient déjà importantes sur le plan économique à travers les primes que toucherait le PSG, encore plus si le club va loin, explique Christophe Lepetit. Si en plus cette qualification est portée en partie par Neymar, alors oui cela pourrait amener certains dossiers en cours à se débloquer, notamment la renégociation des contrats de sponsoring (équipementier, sponsor maillot) où se situent les plus grandes marges de manœuvre pour faire augmenter les recettes commerciales du PSG aujourd’hui. »

Désireux de diversifier leurs partenariats alors que les montants des contrats scellés avec des sponsors qataris (QTA, QNB, Ooredoo) sont actuellement scrutés par les experts du FPF, les dirigeants parisiens cherchent également à accroître le rayonnement du club sur d’autres continents. « Par ailleurs éliminer le Real en étant porté par Neymar permettrait de développer encore davantage la marque PSG à l’international et donc de valoriser cela dans les négociations futures avec les annonceurs », développe Christophe Lepetit. Autant dire que le Brésilien est au centre des enjeux du duel électrique entre le Real Madrid et le PSG.