Une employée du Nasdaq, le marché des valeurs technologiques, à New York, le 14 février 2018. / Richard Drew / AP

Certains imaginaient déjà que le 14 février serait un mercredi noir : glacés par la publication des chiffres de l’inflation américaine en hausse (+ 2,1 % sur un an en janvier), les marchés allaient s’effondrer, dans le sillage de la correction brutale enregistrée la semaine précédente. Rien de cela : après une petite baisse en séance, les Bourses européennes ont au contraire terminé en hausse. A Paris, le CAC 40 a gagné 56,02 points, en hausse de 1,1 %, le DAX allemand a grimpé de 1,17 % et la Bourse de Londres a clôturé en hausse de 0,64 %. Après un moment d’hésitation, les indices américains ont également fini la journée dans le vert, à + 1,03 % pour le Dow Jones et + 1,34 % pour le S&P 500. Les taux souverains, en hausse depuis plusieurs semaines, ont peu réagi aux chiffres.

Plutôt rassurant. Pour certains analystes, cela signifie que les investisseurs ont intégré le retour de l’inflation. Pour d’autres, ce n’est qu’un répit : le prochain signe de tensions sur les prix ou les salaires pourrait de nouveau faire dévisser les Bourses. Dans tous les cas, une chose est sûre : la volatilité, qui avait quasiment disparu ces dernières années, a fait son grand retour. Les marchés ont perdu leur boussole, et ils vont devoir s’y faire.

Depuis la crise de 2008, ils se complaisaient dans ce que le Fonds monétaire international (FMI) avait un peu vite défini comme le « nouveau normal » : un cocktail de croissance faible, de salaires stagnants, de taux d’intérêts bas et, surtout, de liquidités massivement injectées par les banques centrales. Ces dernières ont à la fois encouragé les prises de risque, afin de relancer le financement de l’activité, et anesthésié la capacité des investisseurs à mesurer correctement le risque.

« Nous rentrons en terra incognita »

Le retour de l’inflation aux Etats-Unis et la perspective d’un relèvement accéléré des taux directeurs de la Réserve fédérale américaine (Fed) a sonné la fin de la récréation. Le « nouveau normal » du FMI se fissure : la croissance est bien de retour, et avec elle, la hausse de l’inflation et des taux d’emprunt. « Nous avons connu un très long cycle de baisse des taux. Maintenant qu’ils remontent, nous rentrons en terra incognita, a résumé mardi 13 février Laurent Mignon, directeur général de Natixis, lors de la publication des résultats de sa banque. Cela rend les opérateurs et les investisseurs nerveux ».

De fait, ils vont devoir (ré)apprendre à se passer de la béquille monétaire. Car, après la Fed, la Banque d’Angleterre et la Banque centrale européenne vont elles aussi réduire leurs soutiens à l’économie. Dit autrement : « il est peu probable d’observer un retour à la situation inhabituellement calme qui a caractérisé les marchés en 2017 », pronostique Isabelle Mateos y Lago, directrice générale au BlackRock Investment Institute, dans une note sur le sujet.

Ces prochains mois, et même si les fondamentaux économiques sont plutôt sains, chaque indicateur un peu trop bon ou mauvais pourrait se traduire par des surréactions des Bourses et des taux souverains. Au risque de provoquer un krach obligataire, voire, une nouvelle crise financière ? Seule certitude : cette dernière finira bien par arriver. Mais personne n’est capable de prédire si ce sera en 2018, en 2019, ou plus tard…