L’essor d’Airbnb aurait ainsi soustrait 13 500 appartements du marché locatif de long terme à New York / LUCAS JACKSON / REUTERS

L’université canadienne Mac Gill, basée à Montréal, a publié le 30 janvier la première étude approfondie évaluant l’impact du développement d’Airbnb dans une grande ville. Cette étude est intitulée : « Le coût élevé des locations de court terme à New York ». Première observation, les deux tiers des revenus générés par Airbnb proviennent de locations illégales au regard de la réglementation en vigueur à New York. Presque la moitié (45 %) des logements proposés sur le site en 2017 ne respectait pas la loi.

Louer un appartement indépendant n’est pas légal dans 87 % des cas

Depuis 2010, la location d’un appartement de moins de trente jours est illégale à New York dans les immeubles comprenant trois appartements ou plus si le propriétaire n’est pas présent pendant toute la durée du séjour. Ce qui signifie que louer une chambre dans son logement est généralement légal, mais que louer un appartement indépendant ne l’est pas dans 87 % des cas, sachant que les trois quarts des habitations proposées à la location sur Airbnb en 2017 étaient des logements entiers.

L’essor d’Airbnb aurait ainsi soustrait 13 500 appartements du marché locatif de long terme à New York. Sur ce total, 12 200 seraient des logements indépendants loués au moins 120 jours par an, et 5 600 seraient loués au moins 240 jours par an. En réduisant l’offre de logement, Airbnb aurait provoqué une inflation de 1,4 % du loyer moyen à New York au cours des trois dernières années. Cette évolution représente un surcoût de loyer annuel de 380 dollars pour un candidat à la location en 2018, et plus de 700 dollars à Manhattan.

« Gentrification raciale »

Par ailleurs, il existerait environ 4 700 « hôtels fantômes » à New York, c’est-à-dire de grands appartements proposant plusieurs chambres à la location sur Airbnb. Il s’agit pour leur propriétaire d’un moyen de contourner la loi. Ces locations auraient retiré 1 400 logements supplémentaires du marché locatif de long terme. A elles seules, ces pratiques seraient à l’origine de 28 % des revenus générés par Airbnb à New York. L’étude montre ainsi une forte concentration des revenus générés par le site : 10 % des propriétaires toucheraient 48 % des loyers.

En moyenne, la location de courte durée rapporte 55 % de plus que la location « classique » à New York. Presque trois cents propriétaires ont ainsi touché plus de 100 000 euros de loyers grâce à Airbnb en 2017. Pour les chercheurs de Mac Gill, le site serait « un instrument de gentrification raciale ». Reprenant les chiffres d’une étude publiée en mars 2017 par le site InsideAirbnb, ils expliquent que dans les soixante-douze quartiers de New York dont la population est majoritairement noire, les propriétaires blancs proposant leur logement sur Airbnb sont cinq fois plus nombreux que les noirs.

« Dans ces quartiers, 74 % des propriétaires présents sur Airbnb sont blancs et 14 % sont noirs », précisent-ils. Quand les revenus générés par les propriétaires blancs atteignent 160 millions de dollars, ils ne dépassent pas 48 millions de dollars pour les propriétaires noirs, même dans ces quartiers majoritairement noirs. Comme 80 % des habitants de ces quartiers sont noirs et 14 % sont blancs, la population noire potentiellement affectée par l’essor d’Airbnb est six fois plus nombreuse que la population blanche.