Après onze ans de bataille judiciaire, Tenin D., 54 ans, a été condamnée lundi 19 février à dix-huit mois de prison avec sursis pour « aide au séjour irrégulier », « travail dissimulé » et « soumission d’un mineur à des conditions de travail et d’hébergement indignes ». Elle a en effet exploité Astan K., une adolescente malienne de sa famille, pendant cinq ans à Châtenay-Malabry (Hauts-de-Seine).

Le tribunal correctionnel a suivi les réquisitions du procureur et assorti cette peine de 60 000 euros de dommages et intérêts pour la jeune victime, aujourd’hui âgée de 31 ans, et d’un euro pour le Comité contre l’esclavage moderne, qui s’était porté partie civile.

Esclave domestique entre ses 13 et 18 ans

Astan K. avait 13 ans lorsqu’elle a rencontré, en août 2000, Tenin D. lors d’un mariage. Cette cousine éloignée, à l’époque enceinte de son quatrième enfant, propose au père d’Astan d’accueillir sa fille en France. « Je devais faire des études et m’occuper des enfants de temps en temps. Je lui ai fait confiance », raconte la jeune femme à la barre du tribunal correctionnel de Nanterre, le 22 janvier.

Deux semaines plus tard, elle prend l’avion et se voit confisquer son passeport à son arrivée par sa cousine. S’en suivent cinq ans de corvées et de maltraitance sans repos ni rémunération : dans le petit trois-pièces de Châtenay-Malabry qu’occupe la famille, elle alterne cuisine, ménage, courses pour une maisonnée de neuf personnes dont cinq enfants, entre quinze et dix-huit heures par jour.

Elle quitte finalement le domicile cinq ans plus tard, à 18 ans, en octobre 2005, grâce à un jeune homme qui l’avait poussée à partir et à porter plainte.

Onze ans de procédures

Cette condamnation est l’aboutissement d’une procédure exceptionnellement longue de onze ans. Le juge d’instruction ayant d’abord rendu un non-lieu en 2009, la plaignante avait fait appel, passant par deux fois par la Cour de cassation, avant d’obtenir un renvoi de sa cousine éloignée devant le tribunal.

La plaignante, entendue au cours de l’enquête, avait en effet toujours nié les coups et la privation de nourriture. Elle avait aussi assuré que l’adolescente faisait des travaux ménagers « comme l’ensemble des enfants » et qu’elle recevait de « l’argent de poche ».