Gabriella Papadakis et Guillaume Cizeron ont terminé à la deuxiéme place du programme court, en danse sur glace. / Bernat Armangue / AP

« Pourtant, c’était cousu. » Tout allait pour le mieux quand les patineurs français, Gabrielle Papadakis et Guillaume Cizeron ont fait leur entrée sur la glace de la Gangneung Ice Arena, lundi 19 février. Favori de l’épreuve de danse sur glace – au même titre que les Canadiens Virtue et Moir, qui les avaient précédés –, le couple de danseurs français a terminé à la seconde place du programme court (81,93 points) dans des circonstances « rageantes », s’agaçait le patineur. Au tout début de leur programme, un point du tour de cou de Papadakis – qui retenait son costume – a sauté, dévoilant par moments un téton au vu et au su de tous.

« Mon pire cauchemar est devenu réalité aux Jeux olympique, a relaté la patineuse, logiquement éprouvée par l’incident. Je m’en suis de suite rendu compte, et j’ai prié. Que pouvais-je faire d’autre ? »

Sans se démonter – du moins en apparence –, les Bleus en noir et vert ont enchaîné leurs figures, ne laissant paraître leur désarroi que sur un twizzle (une succession de voltes) mal ajusté. Avec un point et demi de retard sur leurs partenaires d’entraînement, Tessa Virtue et Scott Moir (médaillés d’or à Vancouver en 2010 et d’argent à Sotchi), les Clermontois limitent la casse en vue du programme court, mardi (à 2 heures du matin, heure de Paris).

« Difficile de dissimuler sa poitrine quand on fait des rotations »

« Il y avait des attaches. On avait cousu le truc, et ça a sauté au tout début du programme », raconte Romain Haguenauer. Coach des doubles champions du monde (et quadruple d’Europe), celui qu’ils ont suivi à Montréal voilà quatre ans pour s’entraîner a immédiatement vu une partie du haut du costume de Gabriella Papadakis sauter, et a salué la performance de ses protégés. « Vu ce qu’il s’est passé, je suis content qu’ils soient parvenus à rester concentrés. Car Gabi a été déconcentrée : à un moment, elle a pensé à ne pas finir complètement nue. »

Au patinage artistique, discipline notée, les costumes ont leur importance car servant de première impression aux juges. Mais des mésaventures comme celle vécue par les Français sont extrêmement rares. Et pas question pour les Bleus de s’interroger avant la fin de la compétition sur les raisons ayant poussé le costume de la danseuse, élaboré par une créatrice lyonnaise, à céder.

« Ce n’était pas facile de rester concentrés, reconnaît Gabriella Papadakis. Après avoir fait le métier en zone mixte avec les journalistes, la jeune femme s’est effondrée dans les bras de son coach. Mais on est allés jusqu’à la fin, et on a essayé d’en profiter au maximum. » « Ça nous est resté à l’esprit durant tout le programme, et ça nous a affectés, a abondé Guillaume Cizeron, plus frustré qu’abattu. Car c’est difficile de dissimuler sa poitrine quand on fait des rotations. »

Riant nerveusement, sa partenaire a remercié, lorsqu’on l’a interrogée sur sa performance et non sa mésaventure costumière. Qui tourne déjà en nombre sur les réseaux sociaux, prompts à s’emparer d’épisodes de ce style. « On est aux Jeux olympiques, il faut performer, il y a la tunique qui lâche… Ça fait beaucoup de choses à gérer, souffle Haguenauer. Mais ç’aurait vraiment pu être pire : si elle s’était arrêtée pour le remettre, ç’aurait été dramatique. »

Se remobiliser pour le programme libre

« Toute interruption de programme, que ce soit de ton fait ou par le juge arbitre, tu perds cinq points, rappelle Katia Krier, DTN (directrice technique nationale) adjointe de la FFSG, expliquant pourquoi les danseurs n’ont pas tenté de résoudre le problème. Et de saluer la force de caractère de Gabrielle Papadakis. C’est pas pareil de continuer à patiner en te disant que tu vas finir nue. Elle est très forte mentalement. »

« C’est très frustrant, l’erreur n’est pas due au patinage », a poursuivi la DTN adjointe. « Ce n’est pas à ça que tu te prépares quand tu t’entraînes, a souligné Guillaume Cizeron. Mais je suis fier de la façon dont on a mené notre programme, en dépit de pareille difficulté. On aspire à un nouveau jour demain. On a toutes nos chances pour l’emporter et on fera de notre mieux. »

Depuis des mois, Gabriella Papadakis et Guillaume Cizeron étaient focalisés sur les JO, l’objectif principal de leur saison. / Julie Jacobson / AP

Si leur tâche sera difficile, « ça peut se remonter », estime leur coach, rappelant que le couple l’a déjà fait. Après le programme court, les Canadiens ont 83,67 points, contre 81,93 pour les Bleus, loin devant les Américains Hubbell et Donohue, troisièmes (77,75). Avant toute chose, les Français doivent oublier l’incident du jour – chose ardue pour des jeunes gens branchés sur les réseaux sociaux – et se remobiliser. Ils ont un jour pour le faire, et faire vérifier leurs costumes dans leurs moindres coutures.