Lors d’une conférence de presse de la police thaïlandaise dans l’affaire de l’« usine à bébés », à Chonburi, dans le sud du pays, en 2014. / Sakchai Lalit / AP

Le Japonais aux treize bébés nés de mères porteuses a gagné : un tribunal de Bangkok, lieu de naissance des enfants, a statué, mardi 20 février, en jugeant que Mitsutoki Shigeta, 28 ans, était bien leur « seul parent ». Après quatre ans de bataille juridique en Thaïlande, la cour aura donc finalement reconnu que les treize rejetons de ce fils de milliardaire japonais, dont les âges oscillent entre 4 et 6 ans, sont légalement bien les siens.

Le jugement clôt une affaire qui avait éclaté durant l’été 2014, quand des voisins du Japonais habitant dans la vaste demeure d’un quartier résidentiel de Bangkok, avaient prévenu la police qu’une véritable « usine à nourrissons » était installée dans leur rue. Les policiers découvrirent alors dans la maison de Mitsutoki Shigeta neuf bébés qu’il avait eus d’autant de mères porteuses, sans compter les quatre autres, plus âgés, envoyés auparavant au Cambodge voisin.

Le scandale avait attiré l’attention des autorités et des médias internationaux sur le manque de réponses juridiques appropriées en Thaïlande face au commerce lucratif et grandissant de « location de ventres » de femmes issues des zones les plus déshéritées du pays. Ces dernières étant rétribuées par de riches étrangères qui ne peuvent concevoir elles-mêmes des bébés.

Selon la police thaïlandaise, Mitsutoki Shigeta avait payé à l’époque les mères porteuses entre 9 000 et 11 000 euros. Il avait d’abord expliqué que son désir immodéré de procréation était lié à son ambition politique, les enfants pouvant lui servir d’électeurs potentiels. Il avait par la suite changé de version, affirmant qu’une progéniture abondante lui permettrait de gérer l’empire familial en dépêchant ses enfants de par le monde.

« Période de transition »

A la suite de la découverte de l’« usine », les enfants avaient été confiés à la garde des services sociaux du royaume. Puis le Japonais porta l’affaire devant les tribunaux thaïlandais, réclamant de se voir attribuer un droit légal de paternité. Quatre ans plus tard, les enfants vont donc pouvoir être rendus à leur père « légitime », la cour ayant insisté par ailleurs sur le fait que « le comportement du plaignant n’est pas sujet à caution » et que sa fortune lui permettra d’« assurer le bonheur de ses enfants ».

Ces derniers ne seront peut-être pas immédiatement rendus à leur père. L’avocat de ce dernier, MKong Suriyamontol, a reconnu que, puisque les enfants avaient été confiés à la garde des services sociaux « durant si longtemps », il allait sans doute falloir respecter une « période de transition » avant qu’ils ne puissent aller s’établir avec leur père au Japon.

Le scandale aura eu des conséquences : la Thaïlande a interdit le commerce de mères porteuses en 2015 et le Cambodge, où s’était déplacé le « business », a été obligé de suivre, interdisant cette « industrie » l’année suivante. Cette dernière utiliserait désormais le Laos comme nouvelle base : dans ce petit pays voisin, au régime autoritaire et corrompu, tout reste encore possible.