« Appassionata, Acte 2 », d’Emmanuel Lagarrigue à la galerie Sultana (Paris 20e). / AURÉLIEN MOLE/COURTESY OF GALERIE SULTANA

C’est comme un opéra, mais sans le son, et sans le décorum rococo. ­Emmanuel Lagarrigue a mis en scène, autour de ­formes qui sont des ­personnages, cette exposition, en trois actes successifs, de langues fantômes. Ces jours-ci, c’est le deuxième acte qu’il donne à voir (le dernier se jouera à partir du 15 mars). Le sculpteur passionné de littérature y prolonge les recherches qu’il mène depuis quelques années sur les mots, leur incapacité à dire, le vertige de leur absence. Truffée de références plus ou moins lisibles, de Boy Meets Girl, de Leos Carax, aux duos baroques de Scarlatti, l’exposition ­s’offre à déchiffrer tout doucement, au fil de son déroulement. Tout ici est à lire, à sous-entendre. Quelques lampes clignotent, en équilibre sur des armatures de cuivre : ­elles délivrent en morse les paroles du poète Paul Celan. Des vitraux abstraits, eux aussi encodés, contiennent les cendres d’une partition musicale. Inspirés de fragments de film, des rideaux qui ­filtrent et colorisent la ­lumière bougent à travers l’espace, silhouettes elles aussi spectrales. De-ci de-là, une main de mannequin feint d’être le chef d’orchestre de cette énigme : elle forme en fait de ses doigts les ­lettres du mot silence, en langue des signes.

« Appassionata », Emmanuel Lagarrigue, galerie Sultana, 10, rue Ramponeau, Paris 20e. Du mardi au samedi de 11 heures à 19 heures. Jusqu’au 31 mars.