Des tractations politiques difficiles s’annoncent en Italie, où les élections législatives du dimanche 4 mars n’ont permis à aucune majorité claire d’émerger. Les partis traditionnels ont été débordés par l’extrême droite de la Ligue du Nord et l’ovni contestataire qu’est le Mouvement 5 étoiles.

Les négociations ne devraient pas commencer avant l’ouverture de la législature, le 23 mars, mais plusieurs visages de la politique italienne s’imposent déjà comme de futurs acteurs-clés.

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  • Luigi Di Maio, le contestataire qui veut être incontournable

Le chef de file du M5S, Luigi Di Maio. / CARLO HERMANN / AFP

Il se voulait le visage modéré d’un mouvement populiste créé en 2009 par l’humoriste Beppe Grillo : Luigi Di Maio avait de quoi exulter, dimanche soir, à l’annonce des premiers résultats. Le Mouvement 5 étoiles (M5S), qui a longtemps refusé toute alliance, s’est imposé à l’issue des élections législatives comme le premier parti d’Italie.

Avec 32,4 % des suffrages obtenus à la Chambre des députés et 32 % au Sénat, le parti populiste n’a pas obtenu de majorité lui permettant de gouverner seul, mais clame qu’aucune tractation ne se fera sans lui. « Tout le monde va devoir venir nous parler », a commenté, dimanche soir, le responsable du M5S, Alessandro Di Battista.

A 31 ans, Luigi Di Maio s’est attaché pendant la campagne à représenter le visage rassurant du parti contestataire. Alors que le M5S avait rejoint, en 2014, le même groupe parlementaire que le parti britannique UKIP (pro-Brexit), Luigi Di Maio assurait en février au Monde que son parti était favorable à l’Europe : « Certes, nous sommes critiques, mais nous voulons rester dans l’Union européenne, et bien sûr, nous voulons rester dans l’euro. »

  • Matteo Salvini, le pari de l’extrême droite

Le leadeur de la Ligue du Nord, Matteo Salvini. / PIERO CRUCIATTI / AFP

A bientôt 45 ans, Matteo Salvini est le chef de file du parti d’extrême droite de la Ligue du Nord, rebaptisé Ligue pour cette campagne. Après une campagne menée à coups de messages extrémistes et de provocations, ce Milanais qui a centré la campagne des élections sur les thèmes de l’immigration et de l’insécurité a remporté une forme de victoire.

Il est parvenu à parachever la mutation de la Ligue, naguère recroquevillée sur le nord du pays, en grande formation d’extrême droite rayonnant sur la totalité du territoire, sans pour autant s’affaiblir sur ses bases de Lombardie et de Vénétie.

La Ligue de Matteo Salvini est surtout arrivée en tête au sein de la coalition formée pour ces élections avec Silvio Berlusconi et sa formation Forza Italia. La Ligue a décroché environ 18 % des suffrages dans les deux chambres, contre 14 % pour le parti de l’ancien président.

Dans le cadre de leur accord de coalition, le parti de Matteo Salvini et Forza Italia avaient convenu que la formation qui arriverait en tête prendrait la direction d’un éventuel gouvernement. Si leur alliance ne semble pas suffisante pour une majorité, le parti d’extrême droite pourrait chercher d’autres alliés.

  • Sergio Mattarella, l’arbitre

Le président italien Sergio Mattarella. / ALESSANDRO BIANCHI / REUTERS

Avec aucun parti obtenant la majorité absolue, une période de tractations va s’ouvrir dans les prochains jours. Placé par la Constitution italienne en position d’arbitre, le président de la République, Sergio Mattarella, devra décider à qui il confiera la charge de former un gouvernement.

Pour ce faire, il dispose d’un peu de temps : avant que ne commencent les négociations officielles, il faut attendre l’ouverture de la législature, le 23 mars, puis la désignation des présidents et vice-présidents des Chambres et des divers groupes.

Très fin connaisseur du monde politique italien, il passe pour un fin manœuvrier, en même temps qu’un homme de sang-froid. Des qualités qui ne seront pas de trop s’il veut conserver une chance d’épargner à l’Italie un grand saut dans l’inconnu.

  • Matteo Renzi, vers des tractations compliquées

Le secrétaire général du Parti démocrate, Matteo Renzi. / ALESSANDRO BIANCHI / REUTERS

Les tractations s’annoncent difficiles pour l’ancien chef du gouvernement Matteo Renzi, actuel secrétaire général du Parti démocrate. Avec 18,8 % des suffrages obtenus à la Chambre des députés et 19,2 % au Sénat, selon les premiers résultats, le PD est le deuxième partie d’Italie, mais il atteint son plus bas niveau historique, largement devancé par le M5S et la coalition de droite.

Renzi aura-t-il les moyens de s’accrocher à son poste, comme il l’avait annoncé par avance, quelques jours avant le scrutin ? Rien n’est moins sûr, et les rumeurs de démission prochaine n’ont cessé de grandir durant la nuit de dimanche, durant laquelle le vice-secrétaire du PD Maurizio Martina a reconnu devant la presse une « défaite très claire ».

  • Silvio Berlusconi, le difficile retour

L’ancien premier ministre, Silvio Berlusconi. / Antonio Calanni / AP

Dans un tweet de février, Silvio Berlusconi avait déclaré : « Je suis comme le bon vin, en vieillissant je m’améliore, et maintenant je suis parfait. » A 81 ans, l’ancien premier ministre italien prévoyait un nouveau retour : alors que ses condamnations lui ont interdit toute fonction publique jusqu’en 2019, « le Cavaliere » avait mené campagne pour son poulain Antonio Tajani au sein de son parti Forza Italia.

La coalition de droite qu’il avait formée est arrivée en tête des résultats provisoires, dimanche, mais sans majorité pour former un gouvernement. Surtout, Forza Italia a plusieurs points de retard sur la Ligue, alors que leur accord implique que le leadeur du groupe en nombre de votes prenne la tête du gouvernement. Dans la nuit, l’ancien ministre Renato Brunetta, qui a fait office, toute la soirée, de porte-parole de Forza Italia sur les ondes, a été forcé d’admettre, du bout des lèvres, que son parti respecterait l’accord. Silvio Berlusconi, lui, est resté silencieux.