Passer d’un système privilégiant la prison à une justice qui préfère d’autres sanctions et que, prison ou non, les peines soient réellement et immédiatement appliquées : tels sont les principes de la « refondation » pénale que doit annoncer, mardi 6 mars, à Agen, Emmanuel Macron.

Devant l’Ecole nationale d’administration pénitentiaire (ENAP), où il se rend avec la garde des sceaux, Nicole Belloubet, le chef de l’Etat doit présenter sa vision d’une justice qui abandonne la préférence carcérale pour d’autres « punitions », en partie inspirée des pays du nord de l’Europe.

L’objectif est non seulement de rendre les peines plus efficaces mais aussi de lutter contre la surpopulation carcérale. Avec un taux d’occupation de 200 % en région parisienne et de 120 % au niveau national, la France figure parmi les plus mauvaises élèves d’Europe. Au 1er janvier 2018, on dénombrait 68 974 détenus pour… 59 765 places.

  • Développer les peines alternatives

Reprenant un des engagements forts de sa campagne, Emmanuel Macron a déjà annoncé ces derniers mois vouloir à la fois qu’une peine de prison prononcée soit réellement exécutée et développer de manière « massive » les peines alternatives. Comme une troisième voie entre une gauche taxée de « laxisme » et une droite dite « répressive ».

Parmi les annonces fortes attendues, il pourrait écarter l’option de la prison pour les peines les plus courtes et élargir l’éventail des autres peines (bracelet électronique, travaux d’intérêt général) et des formules de probation (mise à l’épreuve). Ces solutions existent déjà mais restent peu utilisées : en 2016, sur les quelque 550 000 délits sanctionnés, les tribunaux ont prononcé 52 % de peines de prison (dont 19 % ferme) et 11 % de peines alternatives, dont moins de 3 % de travaux d’intérêt général.

  • Réduire les délais d’application des peines

Le chef de l’Etat entend également réduire les délais, qui peuvent atteindre des mois, voire des années, entre le prononcé d’une peine et son application. Autre piste, une libération automatique aux deux tiers de la peine, sauf avis contraire du juge.

  • Vers la suppression de l’aménagement d’une peine de prison

En revanche, il veut qu’une peine de prison prononcée soit effectivement et aussitôt exécutée. « L’emprisonnement ne sera plus la peine centrale », résume la présidence. « Mais est-il souhaitable que, quand on prononce une peine d’emprisonnement, elle soit dans un second temps, par un autre juge, transformée en autre chose ? Non. C’est cela qui est remis en caus. » Le chef de l’Etat devrait donc revenir sur la loi qui depuis 2009 prévoit d’aménager les peines de prison inférieures à deux ans pour les primodélinquants.

  • Créer 15 000 places supplémentaires

Il devrait aussi détailler sa promesse d’accroître de 15 000 les places de prison et le « plan pénitentiaire » annoncé à la mi-janvier alors que de nombreux établissements étaient en partie bloqués par les surveillants, en colère après une série d’agressions.

Le président a décidé de se saisir personnellement de la question de la peine un jour avant la présentation par Nicole Belloubet des cinq chantiers prioritaires de la chancellerie, avec la transformation numérique, la simplification des procédures pénales et civiles et l’organisation territoriale des tribunaux. Ces chantiers déboucheront sur une loi de programmation de la justice au début d’avril.

A Fleury-Mérogis, le quotidien des surveillants pénitentiaires