Les deux petits-enfants de Jean-Yves Le Drian auraient-ils obtenu une place dans le très prisé lycée français de Barcelone sans l’intervention du consul ? Selon Mediapart, le ministre des affaires étrangères aurait en tout cas sorti l’artillerie lourde et mis en branle la machine du Quai d’Orsay pour garantir toutes les chances de succès à leur demande d’inscription, comme l’attesterait un échange de courriels entre le consul de France d’alors, Edouard Beslay, et le proviseur, Dominique Duthel.

« Dominique, je viens d’être appelé par le directeur de cabinet de M. Le Drian à propos de (…) petits-enfants de M. Le Drian, dont le fils vient de s’installer à Barcelone, écrit ainsi M. Beslay dans un courrier électronique daté du 7 juin, une semaine après la date limite officielle de dépôt des dossiers d’inscription. Il serait donc souhaitable qu’ils obtiennent une place. » Histoire de mettre toutes les chances de son côté, le consul ajoute : « Peut-être aurez-vous ainsi une oreille plus attentive au plus haut niveau et la joie d’avoir la visite du ministre l’an prochain. »

Ce à quoi le proviseur répond que « ce ne sont pas les niveaux les plus faciles, mais on fera le nécessaire au plus vite bien sûr. » Affaire réglée.

« Il n’y a pas d’affaires, pas de piston »

Pour le proviseur du lycée français de Barcelone, qui dit à Mediapart ne pas se souvenir du message de M. Beslay, si les deux enfants ont obtenu une place, c’est que les classes demandées n’étaient pas saturées.

L’échange de courriers n’en demeure pas moins troublant. Les demandes d’inscription dans le lycée français de Barcelone ont explosé ces dernières années, au rythme de la croissance de la population française dans la ville catalane. Dans un article publié en septembre sur le site d’un média français à Barcelone, Equinoxradio, la responsable des inscriptions reconnaissait que le lycée avait dû rejeter 300 dossiers avant la rentrée 2017, faute de place. Beaucoup de parents se plaignaient de l’opacité des critères d’attribution.

« Avec neuf classes par niveau, le lycée est globalement saturé », reconnaît-on au consulat, « mais surtout pour les premières inscriptions, en début de cursus scolaire. Alors que des places peuvent se libérer dans des classes de niveaux plus avancés. » Pour l’ambassade de France à Madrid :

« Il n’y a pas d’affaires, pas de piston. Nous avons fait les vérifications opportunes et le dossier est arrivé avant la réunion de la commission d’attribution des places. Les services ont fait même tellement de zèle qu’ils ont demandé des pièces supplémentaires pour compléter le dossier des enfants, lesquels répondaient aux critères prioritaires : être français, scolarisés dans un établissement français et avec des parents mutés… »

« Il n’y a eu aucune intervention du ministre ou du cabinet pour un quelconque passe-droit », assure aussi au Monde le cabinet de M. Le Drian. Pour des questions de sécurité, la présence de ses petites-enfants a en revanche pu être communiquée au consul.

Le ministre, lui, n’est pas encore venu à Barcelone. Et aucune visite prochaine n’est à l’agenda…