Julien Sellier / Julien KNAUB pour SIPA PRESS

Il est 4 heures du matin et le thermomètre affiche -7 degrés. Le silence règne en maître dans les rues de Paris, vides, tout comme les couloirs de RTL. Dans la station historique de la rue Bayard (prochainement délocalisée à Neuilly-sur-Seine), Julien Sellier s’attelle au travail, un vilain chat dans la gorge : « J’espère que je vais réussir à avoir une bonne voix », murmure-t-il. Dans le studio voisin, une rediffusion des « Grosses Têtes » se fait entendre, en attendant la prise d’antenne de Julien et son équipe.

Derrière son écran d’ordinateur, le jeune trentenaire prépare « RTL Petit Matin », la prématinale de la radio qui réveille plus de 1,5 million d’auditeurs (source Médiamétrie). Un bel accomplissement pour ce « bébé RTL ». « On m’a toujours fait confiance, malgré mon jeune âge », reconnaît Julien Sellier. Passé par une fac d’histoire à Rennes et par l’Institut pratique du journalisme (IPJ) de Paris, il débarque à RTL en 2009, suite à l’obtention de la bourse Jean-Baptiste Dumas. Depuis, il n’en est jamais sorti. Il fait ses premières gammes en reportage avant de se consacrer à la présentation. De 2012 à 2017, il est à l’antenne pour le journal de 19 heures dans « RTL Soir ». Depuis septembre, il a succédé à Stéphane Carpentier (dont il a été le joker) aux commandes de la prématinale.

Décontraction et information

4 h 30 : tout le monde est à son poste. Marina Giraudeau à la météo, Olivia Leray à la présentation du journal. Le chef d’orchestre peut commencer. « Bonjour les amis, j’espère que vous avez bien dormi », annonce Julien d’une voix grave, légèrement enrouée. « Je force à mort », confiera-il plus tard entre deux prises. Fort heureusement, cela ne s’entend pas.

Avec son physique de jeune premier, lunettes arrondies sur le nez, pull, jean et baskets, le Rennais manie l’art de la décontraction, tout en restant sérieux. Sa pastille matinale est un savant mélange de détente et d’information. Entre deux flashs info, le chef François Pasteau vient présenter sa recette du jour, quelques auditeurs éclairent l’actu et Cyprien Cini propose une chronique décalée en fin d’émission. Une ambiance conviviale et bonne enfant règne dans le studio, qui se ressent à l’antenne. « Quand tu te lèves aussi tôt, c’est très sympa de bien s’entendre avec ses collègues », déclare Julien Sellier. On veut bien le croire.

Autour de Julien Sellier, Olivia Leray, le chef François Pasteau et Marina Giraudeau. / RTL

Debout devant son micro, le journaliste ne s’assoit jamais. Exercice sportif ? Pas vraiment… « Avant, je faisais les journaux assis, pas le choix, mais en début d’année je me suis mis debout parce que j’avais mal au dos, et je me suis senti très à l’aise. Bon je suis d’accord, ça fait un peu prof mais c’est très agréable. Je vois tout le monde et pour faire le chef d’orchestre, c’est plus simple. » Comme pour les émissions d’access prime time à la télévision, la prématinale doit « chauffer » les auditeurs avant le grand rendez-vous matinal d’Yves Calvi.

De 4 h 30 à 7 heures, le tempo va crescendo. « Le ton qu’on a à 4 h 30 n’est pas du tout le même que celui de sept heures moins le quart », conçoit Julien Sellier. Le décor non plus. Plus on se rapproche de l’échéance, plus les visages se font sérieux, fermés. Les vestes viennent habiller les épaules des présentateurs de journaux. « Le rythme est un peu plus soutenu au fur et à mesure de la matinale, mais ça se fait vraiment progressivement », explique l’animateur. Une montée en puissance calculée, qui atteint son paroxysme lors de la dernière demi-heure.

Une montée en puissance calculée

Le studio se remplit au fur et à mesure, les couloirs de la station aussi. Dernière ligne droite. La tension monte ; les infos s’enchaînent, comme les intervenants. Les regards restent concentrés, un œil sur l’écran TV qui montre le plateau de la matinale d’Yves Calvi. Il faut garder le rythme jusqu’à la passe d’arme finale.

De l’autre côté du transistor, suit un large spectre d’auditeurs. « On se rend compte qu’on a des réactions de personnes très différentes : des jeunes, des vieux, des actifs, des retraités, des gens de gauche, de droite, des cadres, des ouvriers, des gens qui habitent dans les villes, les campagnes ou les banlieues », remarque Julien Sellier. D’où la nécessité de varier les sujets et les tonalités. « Le matin, les gens sont en train de faire plein de choses, il faut réussir à capter leur attention, faire en sorte qu’ils nous écoutent et pas seulement qu’ils nous entendent. »

Pour préparer « RTL Petit Matin », Julien Sellier travaille surtout le soir, pour tout ce qui est « froid », c’est-à-dire les chroniques et les invités déjà calés la veille. « Je suis plus efficace le soir, j’ai dû garder ça de l’époque où je faisais le “19 heures” ». Puis le matin même, le présentateur se consacre à l’actualité « chaude » : « Je divise en deux le temps de travail, ce que tout le monde ne fait pas. Mes prédécesseurs bossaient entièrement le matin. Je gratte une demi-heure de sommeil. » Toujours cela de gagné... quand, comme lui, on se lève à 2 heures (du matin, cela va de soi).

Donner les premières infos de la journée, faire les premiers choix : voilà ce qui motive Julien Sellier dans cette tranche de lève-tôt. « Même à 6 h 30, on essaie toujours d’avoir un sourire dans la voix. Il ne faut pas oublier que la plupart des auditeurs viennent de se réveiller et c’est la première voix qu’ils entendent. » Quid du reportage ? Le trentenaire ne s’en cache pas, cela lui manque, parfois. « C’est vrai que j’ai arrêté au moment où je commençais à avoir un plus d’expérience, donc il y a toujours un petit regret. Mais j’ai 31 ans, je pourrai y revenir plus tard, ce n’est pas fini ! »