« White Dog », d’après Romain Gary, par la compagnie Les Anges au plafond. / VINCENT MUTEAU

Il était une fois… une comédienne formée à l’art de la marionnette à Glasgow, Camille Trouvé, et un circassien, fil-de-fériste et jongleur à ses débuts, Brice Berthoud, devenu ensuite comédien et marionnettiste. Tous deux fondèrent en 2000 la compagnie Les Anges au plafond, installée à Malakoff (Hauts-de-Seine) et spécialisée dans la création de spectacles originaux mêlant marionnettes à taille humaine, projections vidéo, musiques jouées en direct. Le nom même de leur compagnie évoque « l’irruption discrète de créatures célestes dans notre réalité ».

D’ailleurs, dès leur première œuvre à quatre mains, Le Cri quotidien (2000), c’est une ville entière avec ses habitants qu’ils font surgir des pages d’un grand journal manipulé sur scène. Dans les sept opus qui ont suivi, ils ont développé la même approche artistique autour de plusieurs axes : le papier comme matériau de prédilection pour la construction de leurs marionnettes, l’épopée comme trame narrative, la mise en question de l’espace scénique, le geste de la manipulation visible ou invisible, la présence d’une partition musicale interprétée en live par des musiciens.

Camille Claudel et Romain Gary

Camille Trouvé et Brice Berthoud alternent régulièrement les rôles quand ils créent un nouveau spectacle : quand l’un(e) signe la mise en scène, l’autre interprète les personnages et manipule les créatures de papier froissé qui peuplent leur univers. Ainsi, dans Les Nuits polaires (2004), c’est Brice qui raconte sous un igloo, et avec trois marionnettes, les histoires adaptées par Camille des récits du Groenland de l’écrivain Jorn Riel. Pour le diptyque consacré à la mythologie grecque, Une Antigone de papier (2007) et Au fil d’Œdipe (2009), ils ont inversé les rôles d’écriture/mise en scène et d’interprétation/manipulation d’un spectacle à l’autre.

Les Anges au Plafond - Teaser Au fil d'Oedipe (création 2009)
Durée : 08:12

Pour les deux créations inspirées de la vie tragique de Camille Claudel, Les Mains de Camille (2012) et Du rêve que fut ma vie (2014), c’est logiquement Camille Trouvé qui incarne la sculptrice en proie à ses démons de papier, dans une mise en scène signée par son comparse. Pour leur dernier diptyque en date, autour de l’existence et de l’œuvre de Romain Gary (alias Emile Ajar), avec R.A.G.E (2015) et White Dog (2017, d’après le roman Chien blanc, paru en 1970), c’est elle qui reste dans l’ombre de l’adaptation et de la mise en scène tandis que lui donne vie aux marionnettes sur le plateau aux côtés d’autres comédiens.

Les Anges au Plafond - Teaser Les Mains de Camille (création 2012)
Durée : 04:30

Relations entre l’intime et le politique

Avec Les Anges au plafond, on est bien loin de l’univers enfantin et parfois un peu caricatural du traditionnel Guignol. Derrière l’apparente légèreté de leurs créatures en papier froissé se cache une passionnante réflexion sur les relations entre l’intime et le politique, sur les décalages (mise à distance, humour, dualité, etc.) qui peuvent naître des rapports entre le marionnettiste et les objets qu’il manipule.

L’interaction des comédiens avec le public est également au cœur des créations de cette compagnie qui n’hésite pas à passer de la jauge très restreinte d’un igloo en toile pour Les Nuits polaires au plateau gigantesque de R.A.G.E où quelques spectateurs peuvent choisir de voir le spectacle non pas dans la salle mais assis sur la scène au même niveau que la troupe. Cet univers hors norme est à découvrir dans les huit spectacles de cette compagnie en tournée à travers la France, notamment à Malakoff avec White Dog, du 15 au 21 mars, dans le cadre du 18e festival Marto ! (Marionnettes et objets).

Les Anges au Plafond - Teaser R.A.G.E (création 2015)
Durée : 03:31

Sur le Web : www.lesangesauplafond.net et www.festivalmarto.com