Manifestation contre l’insécurité et l’immigration clandestine, à Mamoutzou, dans l’île française de Mayotte, le 13 mars 2018. / AFP

Le gouvernement de Moroni a dénoncé mercredi 14 mars la « stigmatisation des Comoriens » dans le mouvement social qui secoue l’île française de Mayotte, située au sein de l’archipel indépendant des Comores. « Nous refusons la stigmatisation qui veut que tout ce qui se passe à Mayotte soit le fait des Comoriens des autres îles », a déclaré à l’AFP le ministre comorien de l’intérieur, Mohamed Daoudou.

Le département français de Mayotte est secoué depuis quatre semaines par un mouvement social contre l’insécurité et l’immigration clandestine en provenance de l’Etat voisin et pauvre des Comores, à moins de 70 km de ses côtes. M. Daoudou s’est dit « très préoccupé » par cette crise, qui « paralyse le fonctionnement normal de l’île ». Mais « les Comoriens qui vont à Mayotte ne sont pas des coupeurs de route ou des violeurs. Ils y vont pour du travail ou pour des soins », a-t-il ajouté. Le produit intérieur brut (PIB) par habitant est treize fois plus élevé dans le département français qu’aux Comores.

« De toutes les façons, ces Comoriens sont en situation régulière, ils sont chez eux », a encore déclaré le ministre, rappelant la position de Moroni qui revendique Mayotte depuis des décennies. Au cours d’un référendum organisé en 1974 par Paris dans les quatre îles des Comores, la majorité des électeurs avait voté en faveur de l’indépendance, sauf à Mayotte. La France avait alors décidé de garder cette île dans son giron, une décision condamnée par les Nations unies. Depuis, la question empoisonne les relations entre Paris et Moroni.

Expulsion massive

Mohamed Daoudou a par ailleurs annoncé le démantèlement récent d’un réseau de passeurs, avec des ramifications au Canada, en Afrique de l’Est et à Mayotte. « Depuis, le nombre de traversées a diminué grâce à nos opérations terrestres. Nous allons renforcer ces mesures mais nous n’avons pas les moyens [d’exercer] un contrôle en mer », a-t-il affirmé.

Le ministre comorien de l’intérieur s’est dit « disponible pour collaborer avec les autorités françaises afin de trouver une solution. […] Pour nous, renforcer la sécurité maritime consiste à sauver des vies ». Un rapport du Sénat français estimait en 2012 que les traversées de migrants clandestins entre l’Union des Comores et Mayotte avaient causé « entre 7 000 et 10 000 morts depuis 1995 ».

Interrogé sur l’éventualité d’une expulsion massive de Comoriens de Mayotte, Mohamed Daoudou a estimé que « les expulsions ne sont pas la solution ». « La solution est de veiller à la sécurité de ceux qui vivent à Mayotte. Ce qui nous intéresse, c’est la stabilité des îles et de la région en général. »

Mardi, le gouvernement français s’est engagé à prendre des mesures d’urgence – notamment pour lutter contre les attestations d’hébergement de complaisance et déployer des navires supplémentaires contre l’immigration clandestine – afin de mettre un terme au mouvement social à Mayotte.