Les plaintes visant l’Etat français déposées en janvier par les avocats des familles de trois Françaises qui avaient rejoint l’Etat islamique en Syrie et sont aujourd’hui détenues au Kurdistan syrien avec leurs enfants ont été classées sans suite, a annoncé une source judiciaire, vendredi 16 mars, confirmant une information publiée par Le Parisien.

Le procureur de la République de Paris, François Molins, a cependant interrogé le ministère des affaires étrangères sur le statut du camp dans lequel elles sont censées se trouver et sur l’autorité administrant le camp, ajoute-t-on de même source.

Le Quai d’Orsay sollicité

Il s’agit notamment de savoir s’il s’agit d’un camp de personnes déplacées ou de prisonniers ; précisions nécessaires pour établir si l’infraction de détention arbitraire peut être caractérisée. Elle viserait alors les geôliers kurdes de ces femmes. Selon une source judiciaire, le Quai d’Orsay n’a pas encore répondu « à ce stade » à cette demande d’information.

Dans leurs plaintes les avocats s’appuient sur l’article 432-5 du code pénal, selon lequel une personne dépositaire de l’autorité publique qui a connaissance d’une détention illégale ou arbitraire et ne fait rien pour y mettre fin est elle-même coupable d’une infraction. Les autorités françaises en sont clairement la cible, même si la plainte est portée « contre X ».

Dans un courrier adressé le 19 février aux avocats Marie Dosée, William Bourdon, Marc Bailly et Martin Pradel, M. Molins estime que l’infraction réprimée par l’article 432-5 du code pénal n’est pas caractérisée. Il s’appuie sur le fait que la France n’a plus de représentation diplomatique en Syrie et n’a pas, en la matière, les moyens d’agir sur un théâtre de conflit armé.

Les autorités françaises mises en cause par les avocats

Dans leur réponse à M. Molins, datée du 7 mars, les quatre avocats contestent cette analyse. Ils invoquent le fait que « la France a reconnu l’existence d’un “Kurdistan syrien” à travers la bouche de son porte-parole, Benjamin Griveaux » et rappellent que Jean-Yves Le Drian avait confirmé il y a deux ans, quand il était ministre de la défense, la présence de forces spéciales françaises en Syrie.

Ils estiment en outre que la demande d’information du procureur de la République au Quai d’Orsay est « la parfaite démonstration qu’aucune vérification nécessaire (…) n’a été diligentée par les autorités françaises, pourtant parfaitement informées de la situation » de leurs clientes.

Ils réaffirment que rien, à leurs yeux, ne justifie que leurs clientes soient maintenues en captivité, quelle que soit la nature du camp où elles sont retenues. Ils se réservent le droit, en cas de classement sans suite, de prendre toute initiative de nature à garantir ceux de leurs clientes.