Ils sont indignés. Des internautes et 130 manifestants, réunis, mercredi 14 mars, devant la police aux frontières de Montgenèvre, ont apporté leur soutien à Benoît Ducos, convoqué ce même jour par la police aux frontières (PAF). Son tort ? Etre venu en aide à une famille nigériane en montagne, dont une femme sur le point d’accoucher.

Les faits se déroulent samedi 10 mars au soir. Lors d’une maraude, deux bénévoles de l’association Refuges solidaires, dont Benoît Ducos, trouvent les quatre membres d’une famille nigériane et deux autres migrants perdus à 1 850 mètres d’altitude. « La mère est complètement sous le choc, épuisée, elle ne peut plus mettre un pied devant l’autre. Nos thermos de thé chaud et nos couvertures ne suffisent en rien à faire face à la situation de détresse dans laquelle ils se trouvent. En discutant, on apprend que la maman est enceinte de huit mois et demi. C’est l’alarme, je décide de prendre notre véhicule pour l’emmener au plus vite à l’hôpital », explique Benoît Ducos dans un témoignage diffusé par Joël Pruvost, membre de Refuges solidaires, au site d’information locale Dici.fr.

En chemin, la femme enceinte est prise de contractions et à 500 mètres de la maternité, la voiture est arrêtée par un contrôle des douanes. Là, les versions divergent. Selon M. Ducos, les douaniers prennent tardivement la mesure de l’urgence, alors que « la maman continue de se tordre sur le siège passager », et finissent par appeler les pompiers qui transportent la femme à l’hôpital « à 23 heures passées ». Selon la préfecture, le contrôle a eu lieu « à 22 h 15 » et « la femme se plaignant de fortes douleurs abdominales, les douaniers ont sollicité immédiatement les pompiers », « arrivés sur les lieux à 22 h 31 et à 22 h 43 au centre hospitalier [de Briançon] ».

Le reste du groupe de migrants ainsi que le bénévole sont, eux, conduits au commissariat, où Benoît Ducos est interrogé pendant quinze minutes, selon Libération.

Selon M. Ducos, il a été question d’expulser vers l’Italie le père et les deux enfants, avant que les forces de l’ordre ne se ravisent et ne les conduisent au chevet de la mère, qui les réclamait. La préfecture n’évoque pas de volonté d’expulsion, mais dit simplement qu’ils ont été conduits à l’hôpital à la demande de l’établissement. Ils sont depuis hébergés à Gap par le Samusocial. Les deux autres migrants, eux, ont été reconduits à la frontière dès dimanche.

Une convocation et une enquête « pour déterminer le rôle précis » du bénévole

M. Ducos a par la suite reçu une convocation de la PAF pour transport de personnes en situation irrégulière. Lors de son audition mercredi, il a revendiqué « une action humanitaire ». « Si c’était à refaire, je le referais », a-t-il déclaré à l’AFP. Selon le parquet de Gap, l’enquête se poursuit « pour déterminer le rôle précis » du bénévole, « notamment aux fins d’apprécier s’il doit bénéficier de “l’immunité humanitaire” prévue par les dispositions de l’article L622-4 (3°) du Ceseda », code de l’entrée et du séjour des étrangers et droit d’asile.

Les Hautes-Alpes connaissent une pression migratoire forte : 1 900 personnes ont été expulsées en Italie en 2017 contre 315 en 2016, selon la préfecture. De plus, 1 224 migrants se déclarant mineurs ont été enregistrés par le Conseil départemental, qui ne dispose que de 215 places dans trois centres d’accueil.