Le Bluegrass, le nouveau drone de Parrot destiné aux applications agricoles / Parrot

Lorsqu’un pilote trop aventureux perd le contrôle de son drone, il peut s’en remettre à la fonction dite « retour à la maison ». L’appareil rejoint alors automatiquement son point de départ. Pour Parrot, brutalement confronté à un trou d’air en 2016 qui l’a contraint de tailler dans ses effectifs (257 suppressions d’emploi sur un total de 854 salariés), le retour au bercail est plus compliqué. Mais il paraît en bonne voie.

En effet, ses pertes ont été nettement réduites en un an, passant de 137 millions d’euros en 2016 à 38 millions d’euros l’année dernière, selon les chiffres publiés le 15 mars par l’entreprise. Pour autant, Parrot, seul fabricant d’envergure de drones en Europe, n’a pas l’intention de revenir à son point de départ. La société créée en 1994 a mis à profit l’année 2017 pour procéder à plusieurs changements de cap.

Année de résilience, 2017 – « une période délicate, mais salutaire », selon Henri Seydoux, président et fondateur de l’entreprise – a été marquée par une baisse de 31 % des charges de la société, mais aussi par un double recentrage. Désormais, Parrot se présente comme un « pure player » dans le domaine des drones. Les activités automobiles (kits mains libres, équipements connectés) sont passées sous le contrôle de Faurecia, qui les aura rachetées en totalité en 2022, et la fabrication de casques hi-fi et d’autres objets connectés a été définitivement abandonnée. Ce désengagement a pesé sur le chiffre d’affaires (151 millions d’euros), qui accuse un recul de 9 %.

Le grand défi, dorénavant, consiste à développer les applications professionnelles pour les drones. Celles-ci représentent 29 % du chiffre d’affaires, en hausse de 36 %. Les domaines les plus prometteurs sont ceux de l’inspection d’ouvrages d’art et la réalisation de cartographies numériques à destination de grandes entreprises (SNCF, EDF, Vinci...), mais aussi d’exploitations minières ou des secteurs du bâtiment et de l’immobilier.

L’agriculture offre des débouchés moins prometteurs que prévu, mais les marchés de la sécurité au sens large (équipement des entreprises, des pompiers et de la police, notamment), encore marginaux, enregistrent une forte progression.

Déplacement du centre de gravité

L’entreprise commercialise désormais des solutions professionnelles intégrant la capture des données par voie aérienne, ainsi que leur traitement pour le compte des clients. Les filiales acquises par Parrot pendant les années fastes – senseFly (cartographie professionnelle), Airinov (agriculture), Pix4D (traitement de données 3D) – contribuent également à déplacer le centre de gravité du groupe.

Le Bebop2. / Parrot

L’an passé, Parrot a fait le gros dos en privilégiant les « canaux de vente sélective » et en actualisant à la marge sa gamme de drones de loisirs, dont les ventes baissent de 7 %. Cette spécialité (78 millions d’euros) représente 51 % du chiffre d’affaires et le marché grand public ne cesse de progresser, mais il est outrageusement dominé par le chinois DJI (2,5 milliards de dollars de chiffre d’affaires, soit 2 milliards d’euros ) qui a conquis près des trois quarts du marché mondial.

Parrot, qui admet ne plus représenter qu’environ 20 % des ventes mondiales sur son segment, a dû stopper net ses projets de renouvellement. Quant à la catégorie des mini-drones, dont le français s’était fait une spécialité, elle n’a pas tenu ses promesses et sa pérennité est compromise.

En dépit de ces déconvenues, Parrot n’a pas l’intention d’abandonner les drones grand public, dont il fut le pionnier en lançant, en 2010, l’AR Drone. Ces activités sont moins rentables que les activités professionnelles, qui génèrent une marge brute de 70 %, mais elles offrent des économies d’échelle et permettent d’intégrer plus rapidement les innovations technologiques. Cette année sera lancé un nouveau drone grand public, que l’on suppose plus sophistiqué et plus cher que la série des Bebop, lancé il y a quatre ans.

Parrot, qui avait réalisé fin 2015 une augmentation de capital de 300 millions d’euros (la plus importante opération réalisée en France cette année-là) dispose encore d’une trésorerie nette de 115 millions d’euros. Ce qui, estiment ses dirigeants, doit permettre de continuer d’investir pour transformer le groupe sans être obsédé par les équilibres comptables à court terme.