Agnès Buzyn, sur le perron du palais de l’Elysée, en février. / STEPHANE MAHE / REUTERS

Jeudi 15 mars, Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé, se faisait remettre les rapports de six groupes de travail devant permettre de définir une stratégie de lutte contre la pauvreté des enfants et des jeunes. C’est à l’occasion de la Journée mondiale du refus de la misère, le 17 octobre 2017, qu’Emmanuel Macron avait lancé une concertation sur « l’égalité des chances pour les enfants, quel que soit leur milieu d’origine », la ministre insistant, le même jour, sur sa « nouvelle approche, plus efficace » pour « lutter contre le déterminisme social ».

En novembre 2017, après de longues palabres, était nommé, en conseil des ministres, un délégué interministériel à la prévention et à la lutte contre la pauvreté des enfants et des jeunes, Olivier Noblecourt, qui lançait ces six groupes de travail réunissant associations, services de l’Etat et élus.

Côté associations, le Secours catholique, ATD Quart-Monde, la Fédération nationale des acteurs de la solidarité (FNAS), l’Union nationale interfédérale des œuvres et organismes privés sanitaires et sociaux (Uniopss), on sentait un certain scepticisme puisqu’elles s’étaient déjà livrées à cet exercice en 2013, pour l’élaboration du plan quinquennal de lutte contre la pauvreté. Mais elles ont joué le jeu, participé activement aux quarante rencontres et visites dans toute la France et aux cinquante auditions, étudié la centaine de contributions d’associations et les milliers de contributions en ligne de particuliers…

Le « Magic breakfast » du pays de Galles

« Nous avons travaillé à marche forcée et obtenu que la vision du ministre ne se focalise pas que sur les enfants et les jeunes, mais aussi les familles », se félicite Véronique Fayet, présidente du Secours catholique et présidente du groupe de travail numéro 3 traitant des « leviers de la prévention », aux côtés du député (LRM) de l’Isère, Olivier Véran.

Tout ce travail aboutit, le 15 mars, à cent dix propositions, parfois innovantes, comme créer un fonds national pour la qualité des crèches, instaurer des tarifs sociaux dans les cantines de collège ou en zones rurales, proposer un petit déjeuner à l’école dans les quartiers défavorisés – suivant l’exemple du Magic breakfast au pays de Galles – ; souvent ambitieuses, comme parvenir, d’ici à 2030, à l’accès universel à un mode d’accueil des tout-petits au choix des parents, viser le « zéro sortie d’école » sans qualification à 18 ans, diminuer de moitié, d’ici à 2022, le nombre de nuits d’hôtel des familles à la rue ; mais aussi anciennes comme revivifier la médecine scolaire, en état de déshérence avec seulement 500 postes de médecins pourvus pour 1 500 places ; ou carrément vouées à l’échec comme créer un « revenu jeunes » dès 18 ans et revaloriser le Revenu social d’activité (RSA), ce que le gouvernement a d’ores et déjà écarté.

Que va-t-il en sortir ? Nul ne peut le dire : « Il faut des arbitrages ministériels », a simplement déclaré Mme Buzyn qui paraissait surtout intéressée par tout ce qui concerne la petite enfance, l’apprentissage du langage et la réorganisation de l’action sociale, en s’appuyant prioritairement sur les départements avec lesquels l’Etat passerait des contrats. Mais toute décision attendra au moins le mois d’avril et une annonce du président de la République.