Justin Trudeau, premier ministre canadien, avec le président américain, Donald Trump, à Washington, le 15 mars. / SAUL LOEB / AFP

Mardi 20 mars, le Canada entamera des négociations en vue d’un traité de libre-échange avec les pays membres du Mercosur. Les représentants du gouvernement de Justin Trudeau retrouveront à Ottawa des délégations venues du Brésil, de l’Argentine, du Paraguay et de l’Uruguay. Le Mercosur, constitue un marché de 260 millions d’habitants pour un PIB de plus de 3 000 milliards de dollars canadiens (1 860 milliards d’euros).

« Un accord permettrait au Canada d’obtenir un meilleur accès aux marchés brésiliens et argentins, les deux poids lourds du Mercosur », explique Mark Agnew, directeur affaires internationales à la Chambre de commerce du Canada. Et d’ajouter : « Plusieurs secteurs pourraient bénéficier de cet accord, comme les produits chimiques, les machines et l’équipement. » A l’heure actuelle, les taxes peuvent atteindre jusqu’à 35 % dans le secteur automobile, par exemple. Un enjeu de taille alors que l’Accord de libre-échange nord-américain (Alena) est toujours menacé par Donald Trump.

Le Brésil risque néanmoins d’être plus difficile que les autres à convaincre. Celui-ci s’est longtemps plaint de la concurrence déloyale que livrerait le secteur aérospatial canadien en raison de son financement par le gouvernement. Les discussions s’annoncent ardues le Brésil et le Canada chercheront tous deux à protéger leurs joyaux respectifs : Embraer pour l’un, Bombardier pour l’autre.

Diversifier les relations commerciales

« L’objectif est l’harmonisation des conditions de commerce afin de se protéger des soubresauts politiques et économiques des partenaires », commente Philippe Faucher, professeur au Centre d’études et de recherches internationales à l’Université de Montréal.

Ce n’est pas la première fois que le Canada et le Mercosur essayent de s’entendre. Déjà en 2012, un round de négociations s’était tenu entre le gouvernement conservateur de Stephen Harper et ce bloc économique. « Environ 60 % du PIB canadien provient du commerce international, il n’est donc pas étonnant que le Canada cherche à diversifier ses relations commerciales », fait remarquer M. Faucher. Il rappelle d’ailleurs que le Canada tente de s’entendre avec l’Inde et la Chine mais que les discussions n’avancent guère.

Ces négociations surviennent quelques jours seulement après la signature, le 8 mars, de l’Accord de partenariat transpacifique global et progressiste (PTPGP). Ce dernier est la nouvelle mouture du Partenariat transpacifique mis à mal par le retrait des Etats-Unis des négociations, en janvier 2017. Avec cette entente, le Canada obtient l’accès à un marché de 495 millions de personnes, comptant pour 13 % du PIB mondial. Une analyse publiée par Affaires mondiales Canada affirme que cet accord engendrera pour le pays des gains économiques à long terme de 4,2 milliards de dollars.

L’Alena toujours menacé par Donald Trump

Surtout, ces discussions avec ces quatre pays d’Amérique latine interviennent alors que l’Alena est toujours menacé par Donald Trump. Le danger est grand pour le Canada, alors que les trois quarts de ses exportations sont destinées aux Etats-Unis. Selon le Conference Board du Canada, l’abandon de l’Alena entraînerait la perte de 176 000 emplois en deux ans.

En aucun cas une entente avec le Mercosur ne permettra de compenser ce choc. En 2016, le commerce bilatéral entre le Canada et Mercosur n’a totalisé que 8,1 milliards de dollars, alors que les échanges entre le Canada et les Etats-Unis se sont chiffrés à 544 milliards. Pour autant, en s’entendant avec le Marché commun du Sud, le Canada, qui possède déjà des accords avec le Chili, le Pérou et le Mexique s’assurerait un accès à la quasi-totalité de l’Amérique du Sud. En combinant le Mercosur, l’accord signé avec l’Europe et le PTPGP, le Canada aurait accès à un marché combiné plus de quatre fois la taille des Etats-Unis.