Jacques Brune, le 10 mars, à Saint-Denis, lors de la victoire du XV de France sur l’Angleterre. / Christophe Ena / AP

Les Anglo-Saxons ont trouvé un concept pour cela : le fighting spirit. Faute de mieux, Jacques Brunel s’en remet aujourd’hui à cette improvisation. Le nouveau sélectionneur du XV de France a trop peu de temps devant lui. Alors il fait avec : va pour un rugby porté sur le combat et l’envie plutôt que sur un projet de jeu maintes et maintes fois remis sur le métier.

Un coup oui, un coup non, la méthode peut marcher : les Bleus se déplacent à Cardiff, samedi 17 mars en clôture du Tournoi des six nations, pour affronter la sélection galloise (coup d’envoi à 18 heures) avec derrière eux deux victoires consécutives. La première contre l’Italie, la seconde, plus inattendue, il y a une semaine, contre l’Angleterre, après des défaites de justesse face à l’Irlande et l’Ecosse.

Jean-Baptiste Elissalde, entraîneur des arrières, croit déjà « que quelque chose est en train de se passer » . « Déjà, les garçons gagnent, j’espère que ça va leur apporter beaucoup de confiance », déclarait le Toulousain à l’issue de la victoire contre l’Angleterre. De fait, cette série de deux victoires met un terme à une autre, un peu moins glorieuse : huit matchs sans la moindre victoire, soit onze mois très pesants pour les jambes comme pour les têtes.

« Un ballon et des hommes »

Jacques Brunel connaissait le contexte. Le 27 décembre 2017, l’entraîneur acceptait une mission que d’autres ont refusée : remplacer sur-le-champ Guy Novès, viré sans manière par Bernard Laporte, président de la Fédération française de rugby. Avant même sa nomination, l’ancien manageur de l’Union Bordeaux-Bègles faisait part de ses priorités : « Pas tellement le projet de jeu », concédait-il, mais surtout « restaurer une confiance dans les capacités de cette équipe de France ».

Ce qui donne en ses termes :

Quelles que soient les époques, les moyens mis en œuvre sur le terrain il y a un ballon et des hommes. Une fois qu’on a enlevé le ballon, il reste les hommes. Jean-Pierre Rives déjà le disait. »

Dans l’urgence, « on veut jouer mais sans trop s’exposer. Envoyer les ballons à l’aile si on prend trente points, je m’en fous », assène, brut de décoffrage, Geoffrey Doumayrou. Le trois-quarts centre commence à peine à travailler avec le revenant Mathieu Bastareaud qui, à 29 ans, portera le brassard de capitaine ce soir en remplacement du talonneur blessé Guilhem Guirado : le retour en force du centre toulonnais, apprécié pour son impact physique, se prête bien aux combats du moment.

« Si ça se trouve, ça mettra un an avant de trouver l’animation offensive parfaite. Mais on est quand même largement en progression », poursuit Doumayrou, manière de rappeler que la France a passé le réveillon 2017 à une triste 10e place du classement mondial de World Rugby, la fédération internationale. Guy Novès a eu seulement deux ans pour essayer d’appliquer ses préceptes. Jacques Brunel dispose d’un temps tout aussi limité.

Déjà se profile la Coupe du monde au Japon, à l’automne 2019, échéance de son dépannage. Avec cette question en suspens : comment espérer en remontrer aux meilleures nations mondiales, sur la durée, avec un schéma de jeu aussi sommaire ? Réponse à suivre, promet le troisième ligne Kélian Galletier : « On a assimilé le plan de jeu et on est en train de le développer doucement pour le parfaire. » En cas de victoire à Cardiff, les Français peuvent viser au mieux cette année la 2e place du Tournoi des six nations, trophée qui leur échappe depuis 2010.