Le drapeau coréen lors de la cérémonie de clôture, le 18 mars. / NG HAN GUAN / AP

Pyeongchang, c’est fini. Les Jeux paralympiques (JP) se sont terminés dimanche 18 mars par une cérémonie de clôture intitulée « Nous bougeons le monde », axée sur les « barrières cassées », parfait résumé des semaines olympiques et paralympiques qui ont animé cette région quelque peu isolée de l’est de la Corée.

Le ciel nuageux, voire pluvieux, du dernier week-end de compétition, a ajouté un parfum de nostalgie à la fin d’un événement planifié depuis 2011 et le choix de Pyeongchang pour accueillir ces jeux. La ville en était à sa troisième candidature pour décrocher ce qu’elle considérait alors comme une source de « prestige national ».

Des Jeux paralympiques « record »

Lundi 19 mars, la presse saluait des Jeux paralympiques « record ». Avec 335 000 visiteurs –dont beaucoup d’invités, notamment par des stars de la K-Pop comme Lee Dong-wook qui avait convié 1 000 fans pour un match de hockey –, qui ont dépassé en affluence ceux de Sotchi (Russie), en 2014, qui en avait attiré 316 000.

La Corée du Sud elle-même a établi un record de médailles, avec l’or et le bronze de Sin Eui-hyun en ski de fond et le bronze de l’équipe de hockey sur luge. Et la participation d’athlètes nord-coréens a contribué à l’atmosphère de rapprochement entre les deux Corées.

Les réussites sud-coréennes s’inscrivent déjà dans les mémoires, voire sur les écrans à des fins mercantiles. Les membres de l’équipe féminine de curling – stars des Jeux olympiques avec leur médaille d’argent – ont déjà fait leurs débuts dans une publicité pour un aspirateur.

Leur succès a toutefois contribué à celui du curling en fauteuil. Lors de la rencontre du 12 mars entre la Corée du Sud et le Canada, le Curling Center était plein d’élèves d’écoles primaires de la région. L’assourdissante ambiance a surpris des athlètes plus habitués aux enceintes clairsemées. « C’était génial de voir tous ces enfants exprimer leur soutien, a déclaré Jung Seung-won, de l’équipe sud-coréenne. Pour les étrangers, une telle atmosphère peut ajouter de la pression mais pour nous, c’est un plus. » « Ils tirent l’énergie du public, a reconnu le Canadien Mark Ideson, adversaire – malheureux ce jour-là – des Coréens. Mais c’était sympa de vivre ça. »

La couverture médiatique elle-même n’avait jamais été aussi importante, même si les chaînes KBS, SBS et MBC ont été critiquées pour avoir manqué le direct de la victoire de Sin Eui-hyun.

Pour les habitants, la fin des Jeux olympiques et paralympiques laisse une région transformée par l’événement. « Nous sommes partis de rien pour organiser ces jeux », comme le rappelle Sim Jae-guk, le maire de Pyeongchang, municipalité constituée de hameaux blottis au pied des montagnes de la chaîne des Taebaek.

« Les Jeux ont apporté du travail »

Lors de la cérémonie de clôture des Jeux paralympiques, le 18 mars. / PAUL HANNA / REUTERS

La province du Gangwon, où se trouve Pyeongchang, hérite d’une ligne de train à grande vitesse KTX qui relie Séoul en une heure et demie. Avant, il fallait venir en bus, ce qui prenait le double de temps. Une autoroute a également été aménagée. « C’est mieux et moins dangereux que l’ancienne route, qui était sinueuse et montagneuse », témoigne une Séoulite venue passer le week-end dans la région et habituée à se rendre dans le Gangwon pour camper.

Les routes ont été élargies, notamment celle entre Pyeongchang, au cœur des montagnes, et Gangneung, ville du bord de mer, qui accueillait les épreuves sur glace. « C’est bien mais elle n’est guère fréquentée, note un chauffeur de taxi. Les habitants des hameaux de part et d’autre de la route râlent, car avant ils pouvaient traverser facilement. Maintenant, il faut faire des détours. »

Kwong Eung-kyu, qui gère cinq sociétés dans la région et est très impliqué dans les événements internationaux de taekwondo, art martial coréen dont une démonstration fut organisée avec des pratiquants nord-coréens pendant les Jeux olympiques, souligne que les « Jeux ont apporté du travail », surtout aux jeunes, dont les plus anglophones ont été recrutés par les nouveaux et impressionnants hôtels sortis de terre pour l’occasion.

Ainsi du Seamarq sur la plage de Gangneung, propriété de Chung Mong-jun, politicien, ex-membre du CIO et héritier du chaebol (conglomérat) Hyundai. Il a été construit sur l’emplacement d’un autre hôtel datant des années 70 et à l’époque bâti dans une zone anciennement militarisée. Les plages de la région étaient sous étroite surveillance par crainte d’incursions d’agents de la Corée du Nord, à 100 km au nord.

Atmosphère festive

Non loin de là, le Saint John’s et ses 1 150 chambres, ouvert en janvier et pas tout à fait terminé, a aussi fait appel à la main-d’œuvre locale. « J’ai été embauché juste à la sortie de l’université, explique un employé de l’accueil, natif de la ville de 220 000 habitants. Cela m’a permis de rester dans ma région. »

Comme souvent en pareilles occasions, les attentes suscitées ont parfois été déçues. Avec la fin des compétitions, note l’artisan taxi, « les gens vont être contents. Ils vont retrouver leurs taxis. Nous étions vraiment très occupés par les compétitions ». « Les étrangers n’ont pas vraiment profité des richesses culinaires locales, comme le tofu, le bœuf ou encore les nouilles de sarrasin, regrette de son côté le patron de l’excellent restaurant de poisson cru Teakwang, pourtant idéalement placé à deux pas de la plage de Gangneung, entre les hôtels ayant accueilli délégations et visiteurs. Ils allaient plus volontiers dans les chaînes, comme McDonald’s ou dans les cafés proposant des plats de spaghettis. » Une manière de dire que les artisans locaux attendaient plus de retombées.

Pour autant, l’atmosphère festive a rejailli sur le quotidien local. Avant les compétitions, Gangneung avait lancé une campagne pour inciter une population à sourire aux visiteurs étrangers. Au soir des Jeux, l’octogénaire supérieure du petit temple bouddhiste dit « du nuage blanc », perché sur les contreforts des montagnes environnant la ville, constatait : « Les habitants sourient plus aujourd’hui. Ce n’est pourtant pas leur réputation. C’est agréable car c’est finalement assez spontané. »