Tournage de « La Grille », avec Thomas Sénécal, rédacteur en chef F1 de Canal +, et Franck Montagny, consultant. / THIERRY GROMIK

Officiellement, la diffusion en clair par TF1 de quatre Grand Prix au cours de la saison de formule 1 qui s’ouvre dimanche 25 mars à Melbourne (Australie) est une bonne nouvelle. Officiellement, l’arrivée de la plate-forme payante F1 TV, lancée par Liberty Média, propriétaire de la F1 mondiale n’est pas un problème. Officieusement, certains s’inquiètent pour Canal+, déjà en conflit ouvert avec TF1 sur les modalités financières de diffusion globale. C’est au Castellet, dans le Var, cadre historique du retour du Grand Prix de France après dix ans d’absence, que la chaîne cryptée a choisi de contre attaquer, en présentant le 12 mars sa programmation enrichie.

« On est en pleine mutation » admet le rédacteur en chef F1 de Canal+ Thomas Sénécal. Lorsque Canal, diffuseur exclusif en France de la F1 depuis 2012, a remporté en mai 2017 l’appel d’offres pour trois ans supplémentaires, la chaîne savait que quatre Grand Prix étaient attribués à TF1. Elle a même testé la diffusion mixte, en clair sur sa chaîne C8, du Grand Prix monégasque. Un « one shot » encourageant, avec 2 millions de téléspectateurs cumulés, soit le double de l’audience habituelle pour un Grand Prix, et une audience globale pour la F1 en hausse de 10 % en 2017.

Thomas Sénécal, rédacteur en chef de la F1 à Canal +, le 12 mars  au circuit du Castellet (Var). / BERNARD ASSET POUR CANAL+

Chaînes payantes et gratuites ne ciblent pas le même public ; aux premières les fans, aux secondes les occasionnels, capables d’accepter des publicités en pleine course, comme sur TF1. Cela se vérifie dans les pays qui pratiquent déjà la double diffusion. En Australie, ce week-end, Channel Ten et Fox Sports se partagent le marché, sans compter l’offre de streaming en ligne, sur Foxtel Now.

C’est l’autre nouveauté média hexagonale : l’arrivée officielle jeudi 22 mars de la plate-forme à la demande F1 TV, réalisée par Tata Communications. Elle doit permettre, pour un prix autour de 10 euros par mois, de visionner sur ordinateur – dans un premier temps – les 21 Grand Prix de la saison en immersion, grâce à 20 caméras embarquées.

Après avoir déboursé 4,7 milliards d’euros fin 2016 pour racheter la F1, Liberty Media tient à la valoriser. « On voit bien l’intérêt de proposer une offre alternative [F1 TV], stratégiquement pour toucher une nouvelle cible, et tactiquement pour avoir un levier dans la renégociation des droits traditionnels », décryptait Cyril Abiteboul, directeur général de Renault Sport, le 8 mars à Barcelone. Mais à plus long terme, on peut se demander quelle menace cela représente pour les diffuseurs historiques, « qui ont développé une vraie loyauté avec la Formule 1 en investissant depuis des années. » Canal paierait 29 millions d’euros de droits par an et 20 millions de frais de production.

10 heures de direct

« Finalement on a les mêmes problématiques [que la F1 mondiale], reprend Thomas Sénécal. On veut maximiser le show ! » Pour y parvenir, Canal+ a retravaillé « les protocoles d’avant et d’après course. »

L’avant, c’est « La Grille », l’émission sur Canal+ et Canal + Sports qui précède le départ. Présentée par Thomas Sénécal, en alternance avec Margot Laffite, fille du pilote français de F1 Jacques Laffite, cette séquence s’étoffe ainsi de portraits, de reportages dans les stands, dans les motor-homes, et de rencontres avec les fans, anonymes ou people. Les entretiens menés par l’ex-pilote de F1 Jean Alesi sont maintenus.

Sur le plateau de Formula One de Canal +, animé par Margot Laffite (assise à gauche), le 27 août 2017. / THIERRY GROMIK

L’après c’est le magazine « Formula One », présenté par Margot Laffite ou Thomas Sénécal, qui introduit la « note du Grand Prix », à l’image de celle du match de foot. C’est aussi un « On Board » du mercredi enrichi en tableaux et graphiques. Entre les deux, les commentaires en direct restent assurés par le duo très apprécié, constitué par l’ex-champion de F1 Jacques Villeneuve et Julien Fébreau.

Soit un total de dix heures de retransmission en direct par Grand Prix (30 heures pour Le Castellet), à voir sur sa télé, son ordinateur ou son smartphone via l’application My Canal. Point commun à toutes ces rubriques, la ligne éditoriale se recentre sur l’Hexagone. Avec un Grand Prix, trois patrons d’écurie, trois pilotes et une équipe, la France a en effet rarement été aussi présente en F1, ce qui devrait booster l’audience.

TF1 ne s’y est pas trompé. La chaîne diffusera en clair les Grand Prix de Monaco (27 mai) et de France (24 juin). On ignore toujours quelles seront les deux autres courses proposées gratuitement. Ce qui laisse deux mois à Canal pour s’habituer : la Formule 1 c’est sur Canal et c’est aussi ailleurs.