A Marseille, plus de 10 000 personnes ont défilé jeudi 22 mars pour dénoncer la politique gouvernementale. / BORIS HORVAT / AFP

« Aujourd’hui, c’est une bonne base pour la suite. » Olivier Mateu, secrétaire général de l’union départementale CGT des Bouches-du-Rhône affiche sa satisfaction à l’arrivée de la manifestation marseillaise. Et se projette déjà dans la suite d’une mobilisation, qu’il espère durable.

Plus de 10 000 personnes – 55 000 selon les organisateurs – ont défilé dès 10 heures du matin depuis le Vieux-Port, sous un soleil presque printanier, pour dénoncer la politique du président Macron : « casse du service public », réforme du code du travail et des retraites et mesures touchant le statut des cheminots. Un défilé unitaire où flottent notamment les bannières des syndicats SUD, FSU, UNSA, CFDT, mais où la CGT fournit visiblement le gros des troupes. Quelques centaines de manifestants des territoriaux Force ouvrière (FO) ont attendu le cortège lors de son arrivée à la place Castellane, dans le centre-ville.

« Il y a aussi beaucoup de personnes qui sont venues en individuel, sans bannière », estime Chantal Ginoux, ancienne directrice de crèche de 65 ans, venue avec sa pancarte « Pas LOL pour les retraitées ». Depuis le 1er janvier, la hausse de la CSG (contribution sociale généralisée) ampute sa pension de 20 euros par mois. « Il me reste 1 100 euros, avec un loyer à 150 euros… Je suis seule, c’est dur », dit-elle en souriant tristement. « On a l’impression qu’avoir travaillé toute sa vie n’est pas pris en compte », poursuit-elle avant d’expliquer qu’elle a dû retrouver un job : des animations dans les supermarchés qu’elle assure avec sa sœur, Claude Canu, retraitée du secteur privé, venue, elle aussi manifester.

« Nous serons les prochaines cibles »

Manifestation marseillaise contre la politique gouvernementale, jeudi 22 mars. / BORIS HORVAT / AFP

Hôpitaux, fonction territoriale, éducation nationale, employés civils du ministère de la défense, fonctionnaires des finances publiques, avocats, magistrats et bon nombre de retraités… le défilé concentre les secteurs en colère contre la politique du gouvernement. Parti communiste français, Nouveau Parti anticapitaliste et La France insoumise ont également mobilisé leurs sympathisants.

« On soutient nos collègues de la SNCF et les retraités. M. Macron mène une politique qui favorise les plus riches et frappe les plus fragiles », rappelle Gérard Caminzuli, 57 ans, chasuble bleue de la CFDT sur le dos. Fonctionnaire du ministère de la jeunesse et des sports, il est venu avec ses homologues de l’agence régionale de santé (ARS). Tous dénoncent une « volonté explicite de recruter des contractuels au détriment des fonctionnaires » dans leurs différents services. « On essaie de nous amadouer en nous disant “votre statut ne change pas”, mais on se doute qu’après cette première étape, nous serons les prochaines cibles », prédit Olivier Pontal, 50 ans, salarié à l’ARS. « Moi, je dois partir à 62 ans, complète Gérard Caminzuli. Il n’est pas question qu’on remette en cause le calcul de ma retraite et qu’on nous aligne aujourd’hui sur le privé. »

« Le gouvernement nous stigmatise »

Manifestation marseillaise contre la politique gouvernementale, jeudi 22 mars. / BORIS HORVAT / AFP

Didier Trabuc, syndiqué à SUD, et Rémy Reynaud, CGT-Education, enseignent dans le même lycée marseillais « où la moitié des professeurs, dénoncent-ils, sont des contractuels ». De concert, ils critiquent « une attaque contre la fonction publique, sur ses personnels, ses statuts qui, si elle s’inscrit dans un long processus, n’a jamais atteint une telle violence ». Dans la future réforme du bac, ils perçoivent également « une volonté de mettre en concurrence les établissements et de cloisonner encore plus la société ».

Serge Cassaro, 52 ans, cumule deux particularités dans le défilé unitaire : il est délégué Force ouvrière et cheminot. « Notre train pour Paris a été annulé par la grève. Nous sommes victimes de notre succès », dit-il amusé. Plusieurs centaines de cheminots – 600, annonce la CGT – ont, eux, rejoint la capitale, privant d’autant de forces vives le cortège marseillais. Quant à la suite de la mobilisation, le délégué FO reste prudent : « On ne peut pas encore savoir si notre mouvement va prendre. Le gouvernement nous stigmatise et nous allons devoir faire de la pédagogie pour que les gens comprennent que nous ne sommes pas des privilégiés. »