Treize anciens salariés de Philip Morris ont assigné aux prud’hommes le cigarettier pour « contrat illicite », révèle Le Parisien dans son édition du 22 mars. Les plaignants avaient été embauchés, par l’intermédiaire de l’agence de marketing CPM, pour vanter, lors d’opérations de promotion, les mérites d’une nouvelle cigarette mise au point par le grand groupe du tabac, l’IQOS, un appareil électronique au tabac chauffé censé être moins nocif. Ils disent aujourd’hui avoir été manipulés par Philip Morris.

Les commerciaux, rapporte Le Parisien, devaient, selon leur contrat de travail – un CDD de trois mois payé au smic –, « présenter, accompagner les utilisateurs […] d’un produit issu des nouvelles technologies […] respecter scrupuleusement le secret le plus absolu à l’égard des tiers pour toute information recueillie à l’occasion de leurs fonctions ».

Chacun est alors chargé de convaincre les fumeurs parmi ses amis, membres de sa famille, connaissances d’acheter l’IQOS lors de rendez-vous dans un café partenaire. Un système de publicité indirecte « totalement illégal », selon la Direction générale de la santé, la loi interdisant la promotion du tabac sous quelque forme que ce soit. « On nous a dit que ce n’était pas une cigarette », se rappelle l’un des plaignants. « Ils nous ont expliqué que la cigarette était amenée à disparaître et qu’ils bossaient depuis quinze ans sur cette alternative révolutionnaire », précise un autre. Philip Morris, qui impose à ses commerciaux de toujours tester la « cigarette du futur » lors des démonstrations, alors qu’aucun des embauchés ne fume, leur demande en outre de ne pas utiliser le terme « fumer » devant leur public, mais « consommer ».

« On veut réparation »

« On s’est rendu compte que c’était nocif, contrairement à ce qu’ils disaient », font aujourd’hui valoir les plaignants, qui se souviennent également avoir été sous la pression des objectifs de vente assignés par Philip Morris. Les ex-commerciaux décident finalement d’exercer leur droit de retrait et de porter plainte contre l’entreprise emblématique du tabac, à qui ils demandent chacun 115 000 euros de dommages et intérêt.

« Aujourd’hui, on veut réparation, on nous a rendus complices d’une escroquerie malgré nous. »

« La réalité, c’est que mes clients étaient payés pour vendre un produit électronique, ce qui revenait à promouvoir l’usage d’une nouvelle manière de consommer du tabac », argue l’avocat des plaignants, Jonathan Bellaiche.

Les anciens salariés du cigarettier portent également plainte, au pénal, pour « escroquerie » et « mise en danger de la vie d’autrui ». « Plus qu’illicite, embaucher des salariés pour fumer et faire fumer constitue un mépris de la législation et des pouvoirs publics », fait valoir MBellaiche.

« Les faits communiqués à ce stade ne correspondent pas à nos pratiques, se défend de son côté Philip Morris. Le contrat passé entre Philip Morris France et son partenaire concerne uniquement la commercialisation de l’appareil électronique IQOS. Nous sommes très attentifs aux points qui viendraient à être soulevés et ne manquerons pas de les vérifier. »

Tabac : comment les industriels ont menti sur la composition des cigarettes
Durée : 01:46