Comprendre le réchauffement climatique en 4 minutes
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A l’Assemblée nationale comme au Conseil de Paris, on a beaucoup parlé d’environnement, mercredi 21 mars, mais pas dans les mêmes termes ni avec les mêmes résultats. Pendant que le ministre de la transition écologique et solidaire, Nicolas Hulot, déplorait avec véhémence, devant les députés, que « la biodiversité, tout le monde s’en fiche », les élus de la capitale procédaient à une ultime revue de détails du « plan climat, air, énergie » destiné à faire de Paris une ville neutre en carbone et alimentée par 100 % énergies renouvelables à l’horizon 2050.

En fin de journée, les conseillers parisiens ont adopté à l’unanimité le document de 500 mesures qui couvre des secteurs aussi divers que l’énergie, les transports, l’alimentation, le cadre de vie ou la valorisation des déchets. Un premier vote, à l’unanimité lui aussi, était intervenu en novembre 2017. Le plan avait été transmis ensuite, pour avis, à l’Etat, la région et la Métropole du Grand Paris.

La COP21, un accélérateur d’ambition

Ce vaste plan est « la traduction en actes de l’accord de Paris », s’est félicitée Aurélie Solans, la conseillère déléguée environnement qui a conclu les débats en l’absence de Célia Blauel, maire adjointe d’Anne Hidalgo et cheville ouvrière de ce programme d’actions. La neutralité carbone – aucune émission nette de gaz à effet de serre – que vise la capitale est « la condition sine qua non à atteindre le plus rapidement possible pour rester sous le seuil des 2 °C de réchauffement climatique », souligne la délibération adoptée mercredi soir, une référence explicite à l’accord international conclu pendant la conférence climat de décembre 2015 (COP21).

Paris, qui se verrait bien en pionnière de la lutte contre le dérèglement climatique, réfléchit d’abord à son propre destin. Selon les projections de Météo-France, la capitale pourrait subir une forte augmentation du nombre de jours de canicule, jusqu’à 26 jours par an, au lieu d’un jour en moyenne aujourd’hui, et des tensions sur les ressources en eau. Dans la stratégie parisienne, 2030 constitue un premier palier à franchir. La ville devra à cette échéance être en mesure d’afficher une baisse de 50 % de ses émissions de gaz à effet de serre, une réduction de 35 % de sa consommation d’énergie et une part de 45 % d’énergies renouvelables dont 10 % produites localement (objectifs définis par rapport à 2004).

Paris est engagée dans une « politique de longue haleine, assure Aurélie Solans. Nous n’avons pas attendu les obligations de la loi de transition énergétique [2015] pour agir, notre premier plan climat remonte à 2007 et a été révisé en 2012. » Mais la COP21 a fait l’effet d’un accélérateur d’ambition.

Un nécessaire travail de plaidoyer

La rénovation énergétique et les transports sont deux chantiers majeurs de cette nouvelle feuille de route. « L’une des priorités de la ville est de réaliser des économies d’énergie, les bâtiments et la mobilité sont donc logiquement des enjeux clés », confirme Anne Bringault, coordinatrice sur la transition énergétique pour le CLER et le RAC, deux réseaux d’ONG. Paris prévoit de rénover 110 000 immeubles (soit 1 million de logements et 50 millions de mètres carré tertiaires), responsables de plus de 20 % des rejets carbonés de la ville, d’ici à 2050, et de limiter l’éclairage nocturne du parc tertiaire.

Elle se fixe un objectif de zéro véhicule diesel en 2024 et zéro véhicule à essence en 2030. Le volet transport prévoit aussi d’abaisser la vitesse de circulation à 30 km/h hors des grands axes et de construire une capitale 100 % cyclable dès 2020. Mais de nombreuses mesures, comme la baisse de la vitesse en ville, ou, dans un autre registre, l’installation de panneaux solaires sur près de 20 % des toitures parisiennes, suppose des évolutions réglementaires sur lesquelles la Ville n’a pas prise. Un travail de plaidoyer doit accompagner le plan, reconnaît la municipalité.

« Si ces objectifs sont atteints en 2050, je passe dans votre camp », a ironisé Marie-Laure Harel. Comme beaucoup d’élus, la conseillère La République en marche partage la finalité du plan mais s’étonne de l’imprécision des moyens techniques et financiers. Le dernier bilan carbone de Paris, publié en 2016, fait état d’une baisse de 9 % seulement des émissions de gaz à effet de serre (sur la période 2004-2014). « On a accéléré le mouvement depuis, et on doit faire face à une augmentation des activités de la ville », plaide Aurélie Solans.

« Comment ce plan très ambitieux va être suivi ? », s’interroge par ailleurs Anne Bringault, soucieuse de la place de la société civile dans ce processus. Un « comité citoyen digital » devrait voir le jour et les maires d’arrondissement seront mis à contribution, répond l’équipe d’Anne Hidalgo, qui indique aussi qu’une consultation publique, entre décembre 2017 et février 2018, a donné la parole aux habitants et permis de retenir quelques-unes de leurs propositions. Une votation est également prévue, fin mai-début juin, pour mobiliser les Parisiens sur les grandes orientations du plan.